Avec le test de Super Mario Bros 3, les aventures NES de Super Mario prennent fin sur 1UP. La trilogie est complète et cette étape importante, pour Nintendo comme pour nous, mérite qu'on s'y arrête un instant.
Le supplément massif que vous avez devant les yeux a certes des allures de dossier mais il est sans doute trop touffu pour porter ce nom. Il ne s'agit pas de retracer scrupuleusement la carrière de Mario, d'autres l'ont déjà fait, ni de revenir en détails sur ses jeux, vous avez les tests pour ça, mais de vous proposer, à la mode 1UP, différents sujets autour de la trilogie Super Mario et un peu au-delà, en mettant l'accent sur celui qui nous intéresse en particulier aujourd'hui, le troisième volet. Le but est de vous informer bien sûr, mais aussi de revivre une époque, de ranimer les tisons d'un passé qui continue de fuir.
1983-1985 : Avant d'Être Super
L'histoire de Super Mario, c'est un peu comme l'histoire de l'humanité, tout commence avec un singe. Donkey Kong bien sûr, qui a kidnappé la blonde d'un charpentier, le « jumpman », bientôt baptisé Mario. Cela se passe en 1981, et pour donner une leçon à ce chenapan de gorille, la seule solution est de sortir de chez soi et de dénicher la borne d'arcade, dans une salle du même nom ou dans un café. Une suite arrive l'année suivante, mais Mario est relégué au second plan, jouant désormais le rôle du tortionnaire qui retient le malheureux Kong prisonnier. Dans la seconde suite, en 1983, il a cette fois complètement disparu.
Soit dit en passant, charpentier est une profession qui va comme un gant à Mario : c'est lui qui érige la charpente et donc, les surfaces qui vont dessus. Il a vraiment créé la plate-forme en jeux vidéo, dans tous les sens du terme !
Cependant, la même année, pendant que Stanley repousse Donkey Kong à coups d'insecticide, Mario entame une nouvelle carrière... dans les égouts de New York ! Devenu plombier, il lutte pour éliminer les créatures qui infestent les sous-sols de la métropole. Le jeu dont il est la vedette porte enfin son nom, Mario Bros. Si la figure et le nom de Mario sont nés avec Donkey Kong, son univers et sa personnalité ne commencent à prendre forme qu'à partir de ce jeu-ci.
Mario y reçoit en effet sa profession principale et un frère, Luigi, vient le rejoindre pour accomplir le travail. L'action se déroule pour la première fois sur un sol en briques. On y découvre, sous une forme différente de celle que nous connaissons, des tuyaux verdâtres, des tortues vertes et rouges, des pièces d'or tournoyantes et même des boules de feu. Mario ne peut pas encore casser les blocs ni écraser les ennemis, mais il peut tout de même frapper les plates-formes par en dessous pour renverser la vermine, puis la toucher pour s'en débarrasser.
1983 marque un tournant décisif pour Nintendo et pour Mario, dont le destin soudain semble lié. Au même moment où Mario Bros s'installe dans les salles d'arcade, à la mi-juillet, la Famicom, la NES, commence son invasion des foyers japonais. Les deux premiers Donkey Kong et Popeye, titres fondateurs pour le nouveau Nintendo, sont les jeux du lancement. Deux mois plus tard, Mario Bros lui-même est adapté sur la console.
Un calme suit cette période faste. En 1984, Mario limite sa présence à des apparitions (dans Tennis par exemple, où il arbitre les matchs). Nintendo abandonne rapidement le marché de l'arcade pour recentrer ses efforts sur sa console de jeux. En juin 1985, Mario fait finalement son grand retour dans... Wrecking Crew ! Son premier jeu Famicom à ne pas être adapté d'une borne et à offrir un large nombre de tableaux, dotés d'un scrolling. Une fois encore il change de métier et reprend le maillet, vu brièvement dans Donkey Kong, pour incarner un démolisseur.
Mais c'est au mois d'octobre que le grand bouleversement aura lieu, avec le lancement d'un jeu radicalement différent de tout ce à quoi Mario avait participé jusqu'ici. Le petit plombier va dire au revoir aux chantiers, aux égouts, à New York, aux tâches ingrates et aux basses besognes. On suppose qu'à force d'éliminer des bêtes bizarres sortant inlassablement de tuyaux verts, il aura voulu remonter à la source du problème et se sera aventuré un peu trop loin dans l'un d'eux. Cela l'aura conduit au Royaume Champignon et à devenir Super Mario Bros !
En France : Nintendo et la NES
La NES et son jeu phare arrivent en France en octobre 1987. C'est quatre ans après son lancement japonais et surtout deux ans après celui de Super Mario Bros. Entre-temps la technologie a bien évolué et les barrières qu'il a fait tomber ont été abolies par d'autres jeux aussi, plus rapidement disponibles sur le marché français. Nintendo a perdu l'avantage de la nouveauté. Mais ils en possèdent un autre, et ceci en dépit de leur retard.
Dans la France de 1987, avant l'arrivée des consoles Nintendo et Sega, les jeux vidéo existent sous quatre formes : les bornes d'arcade, les micro-ordinateurs, les anciennes consoles, comme l'Atari 2600, vétustes et délaissées, et enfin les jeux électroniques portables, avec en particulier à cette époque les Game & Watch de Nintendo qui font fureur dans les cours de récréation.
L'avantage de Nintendo, outre la qualité exceptionnelle de sa production maison, est que, si les jeux d'action depuis 1985 se sont améliorés, que ce soit ou non grâce aux leurs, ils ne se sont pas encore démocratisés. Les enfants sont trop jeunes pour fréquenter les salles d'arcade et les ordinateurs trop chers pour apparaître dans tous les foyers (où ils sont plus souvent l'outil de travail du père que le jouet des enfants). L'Amstrad s'est implanté, l'Atari ST et l'Amiga viennent d'arriver, mais à plusieurs milliers de francs, les ordinateurs personnels demeurent un luxe. Dans l'esprit des Français, un jeu vidéo ressemble encore à Pac-Man et Pole Position, voire à des pixels monochromes.
Et puis, à cette époque sans Internet, les jeux vidéo ne sont qu'un divertissement parmi d'autres. Les programmes télévisés et la presse jeunesse (Pif, le Journal de Mickey...) occupent une place importante, auxquels s'ajoutent une pléiade de jouets et de jeux de société, les collections, les albums Panini, les billes, la lecture et les disques, les Livres dont vous êtes le héros... Les enfants s'amusent de milles façons et n'ont pas besoin de la technologie pour les désennuyer. Par conséquent, pour réussir à retenir leur attention, il va véritablement falloir les captiver.
Justement, un autre atout pour l'avenir de Nintendo en France est qu'ils ont déjà commencé leur opération séduction. Si les enfants n'ont pas connu Donkey Kong en arcade, ils y ont certainement joué sur Game & Watch. Même avant la NES, les gamins que nous étions connaissaient déjà le nom de Nintendo qui estampillait chacun de leurs jouets électroniques.
La 1ère Fois : Super Mario Bros
Lorsque ce jeune public découvrit le premier jeu vidéo sur télévision dans sa forme moderne, post-Atari, et pour beaucoup donc ce fut Super Mario Bros, il y eut un tel élément de surprise et d'effarement qu'il est difficile de se l'imaginer aujourd'hui. Même ceux qui l'ont vécu auront peut-être du mal à s'en rappeler, tant il faut creuser dans la mémoire de ses sensations. On pourrait le comparer à ce que les spectateurs ressentirent au cinéma en passant du muet au parlant ou du noir et blanc à la couleur. L'idée réductrice qu'on se faisait jusqu'alors d'un jeu vidéo (étriqué, vilain, répétitif) en était bouleversée.
Le premier niveau de Super Mario se déroulait à l'air libre, le second dans un souterrain obscur couvert de briques, le troisième nous ramenait à l'extérieur sur des plates-formes arborescentes et éparses, puis une forteresse apparaissait où l'on devait affronter le dragon-tortue qui retenait la princesse prisonnière. Une telle diversité en si peu de temps surprenait forcément, tout comme la grandeur des niveaux, la facilité de mouvement et les innombrables possibilités. Avant le mur de Berlin, c'étaient les murs des labyrinthes de Pac-Man qui étaient tombés, fracassés par les coups de poing de Mario.
Et logiquement, en arrivant là, à ce gardien fumant de rage sur son pont, on pensait en avoir à peu près fini avec le jeu. Il ne pouvait pas se renouveler sans cesse, c'était impensable. Sans doute nous demanderait-on de rejouer ces quatre niveaux avec une difficulté plus élevée, des variations, et ainsi de suite dans une boucle sans fin, sur la base des jeux de l'époque, comme Donkey Kong par exemple qui possédait lui aussi quatre tableaux en arcade.
Mais derrière le pont, pas de princesse, juste un serviteur qui nous envoyait au niveau suivant. Là se dévoilait un nouveau monde, fait lui aussi de quatre niveaux, tous bien différents, y compris un se déroulant sous l'eau. Et après ce monde, encore un ! Où cela s'arrêterait-il ? On n'en avait aucune idée ! Sa profondeur était insondable ! Ce que Nintendo avait réussi à faire rentrer dans cette cartouche était déjà plus vaste, plus complexe, plus amusant que tous les jeux vidéo qu'on avait vus jusqu'ici !
Contrairement au cinéma, dont nous parlions au début, le jeu vidéo était à cette époque une activité principalement solitaire, tout au plus limitée à de petits groupes, que ce soit de la famille ou d'amis. La présence médiatique alors était faible, avec un magazine surtout, Tilt, plutôt antipathique à la NES (lire l'article sur Tilt en appendice). Aussi, la révolution qui s'opérait se fit-elle en silence, dans l'intimité des foyers, sans l'élément vraiment communautaire qui viendrait plus tard, vers 1989-1990, avec le succès et la reconnaissance. Ce furent d'abord les fanzines et les fan clubs, puis le renouveau de la presse professionnelle, qui reçut le coup de vent frais dont elle avait besoin.
Cette période initiale était l'inverse de ce que nous vivons aujourd'hui, où la moindre bribe d'information a déjà fait le tour du monde un instant après avoir été communiquée. Les expériences de jeu sur consoles en 1987 et quelques années après étaient avant tout sédentaires et personnelles.
Ils Vont 2 par Deux
Que ce soit dans sa version japonaise ou occidentale, la prochaine aventure de Super Mario arriva juste au moment où la console de Nintendo devenait un succès retentissant. Au Japon, il suivit en 1986 le lancement de The Legend of Zelda et du Famicom Disk System sur lequel ils tournaient tous les deux. Le Super Mario Bros 2 japonais est un jeu qui n'a rien à voir avec le nôtre et ressemble beaucoup plus à l'original. On a pu y jouer dans la compilation Super Mario All-Stars.
En Europe et donc en France, l'autre Super Mario Bros 2 débarqua trois ans plus tard, vers 1989, sans qu'on sache précisément quand. Les sorties alors se faisaient sans fanfare, donnant l'impression d'être là juste quand il le fallait, quand les braves qui venaient de voir le bout du premier jeu en redemandaient sans pour autant réclamer de jouer à la même chose.
On ne pouvait pas mieux faire. Tout comme Zelda II, Super Mario Bros 2 proposait une expérience complètement différente qui permit d'asseoir la notoriété des quatre personnages du Royaume Champignon (Mario, Luigi, Toad et la Princesse) et d'élargir leur domaine en créant un tout nouveau monde, où l'on trouvait de discrètes références à l'ancien (un champignon par-ci, une carapace par-là) mais surtout des nouveautés à la pelle, en particulier chez les monstres, plus nombreux et variés que dans l'original, et un gameplay entièrement repensé. Plus une seule brique en vue ! On avait peine à y croire, et pourtant même ainsi Nintendo réussissait encore un jeu passionnant.
Ce fut dans ce second volet qu'apparurent un monde de sable et un de neige, des cascades dans le paysage, ce fut lui qui fit la part belle aux bombes, lança la carrière de Pokey le cactus, ennemi régulier, et de ce grand timide de Shy Guy, un visage occasionnel des jeux Mario quand les Goombas et les Koopas ont besoin de vacances. Ce n'est pas un vrai Super Mario dans le sens où il n'a pas été conçu comme tel dès le départ, mais son appropriation lui va si bien qu'il n'y a pas d'autres façons d'y penser, surtout pour nous autres Occidentaux qui n'avons connu que lui. Même si elle est plus petite, il apporte aussi sa pierre à l'édifice.
On le sait, à la base, notre Super Mario 2 euro-américain est un autre jeu Famicom, Doki Doki Panic. Nintendo l'a modifié, relooké, renommé, puis ils l'ont mis en vente aux Etats-Unis... en octobre 1988. Au même moment où Super Mario Bros 3 sortait au Japon ! Est-ce à dire que les deux jeux ont été développés en même temps ? On ne sait pas trop. On dit dans le test que l'apparence des personnages du 3 est déterminée par le 2, ce qui semble logique, mais il est possible aussi, au vu des dates, que l'aspect ait été décidé de façon simultanée.
Une chose est sûre, ce second épisode va par paire : qu'on le mette avec Doki Doki Panic, avec son homonyme japonais ou celui-ci avec le Super Mario original, qu'il porte le nom de The Lost Levels, Super Mario USA ou Super Mario Advance, l'histoire de Super Mario Bros 2 semble toujours rattachée à un deuxième jeu.
En France : Le Mystérieux 3
Ici, il est important de faire une distinction entre la façon dont nous avons vécu les choses en France et leur déroulement dans le reste du monde. Le 23 octobre 1988, Super Mario Bros 3 naît au Japon. C'est un garçon ! Un an et demi plus tard, c'est au tour des Etats-Unis. Pour nous, l'attente sera plus longue mais se passera bien, pour une raison élémentaire : nous ne sommes même pas au courant que nous attendons quelque chose ! Pour comprendre, faisons un bon dans le temps.
Nous sommes en 1990, dans l'hexagone. La presse spécialisée se porte bien, elle s'agrandit, et même, bifurque : en septembre, le premier magazine dédié aux consoles de jeux fait son apparition chez les buralistes, c'est Player One. Pour la première fois les micro-ordinateurs sont volontairement écartés. Dans les pages de ce premier numéro on peut lire notamment le test de Super Mario Bros 2, qui n'est plus tout à fait d'actualité mais qui est toujours prisé étant le dernier Mario en date.
Deux mois plus tard, dans la rubrique Made in Japan consacrée à l'actualité japonaise, Player One publie la première photo d'un jeu qu'ils nomment « Super Mario IV ». On y voit Mario monté sur un dinosaure vert échappant à un Bullet Bill géant. C'est bien Super Mario World, encore en développement. La Super Famicom est sur le point de sortir au Japon et la liste des jeux à venir fait déjà saliver les joueurs français.
C'est le choc, c'est le bonheur ! Un choc comparable à celui que l'on a eu en découvrant dans Super Mario Bros un second monde, puis un troisième... Voilà que l'on découvre de la même façon totalement inattendue l'existence d'un quatrième jeu ! Mais aussi mauvais soit-on en maths, on ne peut s'empêcher de remarquer que l'on a sauté du chiffre 2 au chiffre 4. Où est donc passé Super Mario Bros 3 ?
On ne sait rien de lui, pas même quelle console l'héberge, et Player One ne va pas nous éclairer. Aucun magazine français alors ne teste les jeux NES des marchés étrangers, ni ne semble au courant des sorties 8 bits au Japon ou aux Etats-Unis. Le marché de l'import est virtuellement inexistant et ne va vraiment prendre son essor qu'avec la PC Engine et les 16 bits. Le mystère reste donc entier, on peut imaginer ce que l'on veut au sujet de ce mystérieux épisode 3. A l'occasion, une publicité égarée pour un marchand étranger dévoilera dans un autre magazine certains jeux NES américains aux plus attentifs, mais clignez des yeux, et elle a disparu comme un mirage.
Deux mois à nouveau s'écoulent. Cette fois, Player One nous présente dans une page alléchante de son numéro 5 la Super Famicom et son jeu phénomène. Super Mario World nous devient un petit peu moins étranger. Les mois s'allongent, les sorties NES se multiplient et le mystère demeure plus impénétrable que jamais. Mais le mal est fait : nos petites têtes se sont ennuyées de penser à cet inconnu sans visage et ne rêvent plus désormais qu'au magnifique Super Mario World.
En France : Arrivée du 3
Il faudra attendre
l'été et la rentrée 1991 pour que la situation soudain s'inverse. Peut-être conscient du danger de cette attente stérile, maintenant que la Super Famicom devenue Super NES se mue lentement en Super Nintendo, Bandai, distributeur de Nintendo en France, décide brusquement de changer de tactique et de privilégier la communication. En juin, Nintendo imprime son catalogue annuel 1991/92. Super Mario y figure toujours en couverture avec son bon vieux champignon jaune et rouge de sa première aventure.
Mais au milieu du catalogue, une surprise nous attend : une page entière est dédiée à Super Mario Bros 3 ! Pour la première fois les « nintendomaniaques » découvrent le jeu, accompagné de quatre photos d'écran et de sa fameuse boîte jaune. On y voit les nouveautés de sa carte et de ses plates-formes panneaux, ainsi que le retour des Goombas et Koopas dans de jolis décors clairs. Du reste, des illustrations originales d'après ce nouveau Super Mario et le précédent sont utilisées tout au long des pages du catalogue.
Comme toutes les autres nouveautés, Super Mario Bros 3 est annoncé avec un simple « à paraître », sans date. Mais à la rentrée, les choses vont s'accélérer. Dans son numéro 5, le magazine du Club Nintendo (un bimestriel envoyé gratuitement à tous ses membres) annonce la couleur. La Lettre de Super Mario, qui fait office d'éditorial, commence de la façon suivante : « La fièvre de Noël et la richesse des nouveaux titres prestigieux qui l'accompagnent se développent rapidement. En tête de la distribution vient ma nouvelle grande aventure, appelée à juste titre Super Mario Bros 3. » Page 22, dans ses Coups d'oeil furtifs, le magazine nous en fait la présentation à l'appui de vilaines photos. C'est un peu raté. Pour se rattraper, au dos, un beau dessin remplit la page, représentant un moment clef absent du jeu, lorsque Mario passe du château au bateau volant, manoeuvré par la marmaille Koopa.
C'est officiel, Nintendo a fait de Super Mario Bros 3 son titre de Noël en Europe continentale. La date de sortie reste vague, même lorsque Player One fait sa propre présentation toujours durant ce mois de septembre 1991 : « d'ici à Noël. » Ils évoquent aussi une campagne marketing sans précédent, « fabuleuse et démesurée » selon leurs propres termes.
Alors que faire d'autre si ce n'est patienter ? Devant la télévision par exemple, le Club Dorothée, Giga ou bien Éric et toi et moi, qui diffusait le dessin animé Super Mario Bros pendant un temps. Et puis un jour d'octobre, au détour d'un épisode de Dragon Ball ou de Sauvés par le gong...
Nintendo coupait l'herbe sous le pied de la presse et venait nous annoncer, eux-mêmes, dans nos téléviseurs, la date de sortie de leur prochain hit ! C'était le Nintendo Direct avant l'heure. Une semaine plus tard, pour ceux qui n'avaient pas encore reconnu le porteur de la casquette et pour continuer de mettre l'eau à la bouche des autres, cet amuse-gueule fut suivi par :
C'était une campagne un peu bizarre, mais l'effet euphorique sur les initiés n'était pas à démontrer. Et le 6 novembre venu, ce petit jeu prit fin avec la sortie du grand, accompagné par un double spot publicitaire :
A ma connaissance, aucun autre jeu Nintendo ne fut amené de cette façon en France, avec comme amorce des spots de 10 secondes, des « teasers ». Rien ne semblant indiqué non plus que les autres pays européens aient eu droit à des publicités télévisées sur mesure.
Player One, qui avait brièvement confirmé la sortie de Super Mario Bros 3 dans son édition d'octobre, l'honora de sa couverture et d'une longue (et trop révélatrice) présentation de 10 pages dans celle de novembre. C'était la première fois que Sam Player partageait la couverture avec un personnage de jeux vidéo. Les petits coquins avaient aussi glissé, comme par inadvertance, sans explication aucune, une demi-image du jeu dans leur numéro d'été, dans un dossier sur toutes les consoles.
Mario se retrouva en couverture de Player One No. 14, de Console + No. 3 (4 pages de dossier, 4 pages de test), de Joypad No. 3, en décembre, et bien sûr du Club Nintendo No. 6.
Les joueurs français lui réservèrent un accueil chaleureux, même s'il est difficile d'en mesurer la température, les chiffres de vente étant perdus dans le temps, ou, plus précisément, ils ne furent jamais obtenus, Bandai France ne communiquant pas sur le sujet. Mais l'on sait au moins deux choses : que 697 000 NES s'écoulèrent en France cette année 1991, le record de sa carrière chez nous, et les chiffres de vente européens du jeu : 3,44 millions d'exemplaires, presque autant que les 3,84 millions japonais, pour un total mondial de 17,28 millions, et ce strictement sur la NES.
Aujourd'hui encore, Super Mario Bros 3 affiche sa présence dans le top 50 des meilleures ventes de jeux vidéo de tous les temps. Il est loin derrière son aîné Super Mario Bros, vers la quarantième place, mais lui n'a été vendu que beaucoup plus tard en lot avec la console, à partir de 1992 aux Etats-Unis avec le Challenge Set, c'est-à-dire après la sortie de la Super Nintendo. C'est la même chose en France, où le pack Super Mario 3 n'apparaît qu'à partir de 1993.
Pour mesurer son succès populaire chez nous, revenons à la presse. Dans son numéro 34 de Mars-Avril 1996, oui, 1996, Ultra Player, le petit frère de Player One et successeur de Nintendo Player, publie son dernier Top NES. Les jeux ne sortent plus depuis longtemps, mais la console résiste grâce à l'affection que les joueurs lui portent encore. A la première place, on trouve Super Mario Bros 3, avec 32 mois de présence dans le classement, 4 ans et demi (le magazine était bimestriel). Depuis sa sortie, il ne l'avait jamais quitté.
Durant les huit années que la NES exista en France, Super Mario régna sur les quatre premières, Super Mario 3 sur les quatre dernières. Niveau popularité, ce roi-là battit largement les Bourbons !
Au Japon : Après le 3
Super Mario Bros 3 mit trois longues années avant d'atteindre la France. Le jeu accusait donc un certain âge à son arrivée chez nous, alors qu'au contraire il était d'une maturité surprenante pour les Japonais.
Pour mieux comprendre son impact en 1988, il est important de se resituer : quand Super Mario 3 sort, Double Dragon, Mega Man et Final Fantasy n'ont encore qu'un seul jeu ! Ninja Gaiden et les Tortues Ninja n'existent pas sur consoles. La Mega Drive va sortir une semaine après lui (et sans doute si Nintendo devance Sega de peu, ce n'est pas un hasard); les consoles portables et la Neo Geo ne sont encore que des concepts; la ludothèque de la PC Engine se compose à peine de 20 jeux; la Sega Mark III, la Master System chez nous, rend son dernier souffle. C'est une période de changements.
Mais il y a plus surprenant encore :
Super Mario Bros 3 est le dernier grand jeu d'action réalisé par Nintendo pour la Famicom. Cela signifie, détail assez troublant, qu'ils n'auront jamais pleinement exploité la console dans les années 90, quand elle était à son apogée technique.
Ces deux déclarations vous seront sans doute difficiles à croire, elles vous paraîtront erronées. Après tout, on parle de 1988 et la Famicom s'est éteinte au Japon en 1994. Nintendo avait d'ailleurs deux jeux cette année-là, en faisant ironiquement l'éditeur le plus actif. Oui, mais de ces deux jeux, l'un était la ressortie de The Legend of Zelda sur cartouche (originellement sur disquette FDS; voir plus haut) et l'autre Wario's Woods.
Si l'on examine le calendrier des sorties, 1984 fut leur année la plus prolifique avec 14 jeux, suivie de 1987 avec 11 jeux et 1985 avec 10 jeux. Le déclin commence à partir de 1988, avec, en nombre de jeux par année : 8, 5, 4, 5, 3, 3, 2.
24 jeux Nintendo furent mis sur le marché après Super Mario Bros 3. Si l'on retire les ressorties et les variantes (Super Mario USA, VS Excitebike...), si l'on groupe les jeux FDS vendus sur deux disquettes séparées, il n'en reste plus que 17. Parmi eux, deux genres sont fortement majoritaires : les jeux de réflexion (8) et les jeux d'aventure textuels (3). Dans la première catégorie on trouve par exemple Dr Mario, Mario & Yoshi, Yoshi's Cookie, Wario's Woods... Nintendo se complaît dans ces softs faciles et rapides à réaliser. La seconde laisse la place à des jeux très japonais, nécessitant eux aussi moins de ressources bien qu'ils soient distribués en deux parties : Famicom Tantei Club 2, Famicom Mukashi Banashi 2 et Time Twist.
Le tri fait, il ne reste plus que 6 jeux non répertoriés. Trois font partie d'un genre hybride aux deux précités : le RPG; tactique dans le cas de Fire Emblem et sa suite Gaiden, régulier dans le cas de Mother. Il y a aussi un jeu de sport (Mario Open Golf) et un jeu de combats de robots d'un aspect peu engageant (Joy Mecha Fight). Le dernier titre enfin est Kirby's Adventure. Lui seul pourrait démentir l'affirmation initiale. Mais Kirby est estampillé HAL Laboratory et si HAL est très proche de Nintendo, à cette époque, ils ont toujours leur propre identité. Kirby est en fait le tournant, le moment où Nintendo s'apprête à les absorber complètement, à en faire des développeurs Nintendo. L'année d'avant, ils sortaient encore un jeu sous leur logo.
Mais de grands jeux d'action Nintendo, il n'y en a aucun. La raison est que, aussitôt Super Mario Bros 3 terminé, il faut penser à la relève, à la Super Famicom, qui sortira en novembre 1990. Leurs meilleures équipes sont mobilisées, celles aux succès internationaux et qui travaillent principalement dans le domaine du jeu d'action (au sens large : plates-formes et aventure), celles dirigées par Miyamoto, Tezuka, Sugiyama... Elles vont bûcher dans les deux années à venir sur la console et ses premiers titres.
Le contre-coup de ce choix est que Nintendo aura abandonné la NES avant qu'elle atteigne sa maturité. Ils l'auront accompagnée au lancement, durant son développement, mais longtemps avant qu'elle entre dans sa plus belle période, le début des années 90, ils l'auront délaissée pour formuler des rêves plus grandioses. Et la Super Nintendo, à son tour, aura subi le même sort quand Nintendo pressentit que le futur était à la 3-D et à la Nintendo 64. C'est un phénomène qui semble se répéter à chaque génération, comme une malédiction, prenant la forme d'une décision impitoyable : la console doit être abandonnée à mi-vie pour se consacrer à la prochaine. La Wii U en est la dernière victime. Mais quand elle pense à la Switch, elle a sans doute un petit sourire de consolation en songeant à ce qui l'attend...
Ainsi les joueurs ne sauront jamais ce que Nintendo aurait pu faire avec la NES de 1992, celle qui nous offrait des décors fournis, des adversaires géants, une richesse visuelle insoupçonnée, entretenue par des éditeurs tiers qui auront eux continué d'affiner leur art sur cette console. On pense bien sûr à Capcom et à leurs jeux devenant de plus en plus beaux, Mega Man en étant la meilleure mesure, avec quasiment un jeu par an entre 1987-93, mais aussi Konami, Taito, Hudson, Sunsoft... Tous ces éditeurs, qui, à contre-courant du grand patron, ne renoncèrent pas à une production NES attrayante. Ce dont Nintendo, autant que nous, peut leur être infiniment reconnaissant.
Conclusion : La Trilogie
La NES reste l'unique console de Nintendo à avoir eu une vraie trilogie de jeux Super Mario. Super Mario Land ? Le troisième est le premier de la série Wario Land. Super Mario Advance ? Juste des remixes des épisodes 8 et 16 bits. New Super Mario Bros ? Variations sur un même thème pour quatre consoles distinctes.
Les trois premiers Super Mario sont eux sur la même console, ont tous Mario, Luigi, Toad et la Princesse en commun, et sont très différents les uns des autres, ce qui bizarrement fait autant leur force que leur unité. Le génie de Nintendo, c'était cette capacité à créer trois jeux de plates-formes autour des mêmes personnages, mais chacun si unique en son genre qu'il pouvait exister et se développer sans l'influence des autres.
On aime Mega Man, mais il faut bien avouer que c'est toujours la même formule retravaillée. Dans une moindre mesure, Castlevania aussi. Au point que ces jeux, et beaucoup d'autres, anciens ou modernes, finissent par devenir des remakes d'eux-mêmes. Mais pas la trilogie Super Mario. Que serait-elle devenue si elle avait été une répétition d'elle-même ? C'est facile, on le sait désormais : elle serait devenue New Super Mario Bros. Ces jeux sont peut-être de grande qualité, mais ils font du Mega Man, ils ont standardisé la formule. Dans Super Mario Maker sur Wii U, vous avez un style Super Mario 1, Super Mario 3, Super Mario World, aucun style Super Mario 2 tellement il est inclassable (c'est tout en sa faveur) mais un seul style général New Super Mario Bros.
Cela soulève une question : pourquoi n'inclut-on pas Super Mario World pour en faire une quadrilogie ? Super Mario World a effectivement sa place auprès des trois autre jeux. Mais il est sur une console différente, il y a séparation, rupture aussi, avec l'ordre numérique, et bien qu'il reprenne beaucoup de choses à son compte il en change également d'autres importantes. Si Super Mario World est bien le dernier Super Mario classique, il l'est sans pour autant s'associer à la trilogie.
Super Mario All-Stars apporte la réponse définitive à cette question en effectuant le parfait regroupement : le Super Mario Bros 2 japonais perd son chiffre et devient The Lost Levels, comme l'extension du premier jeu qu'il est réellement, préservant ainsi l'idée d'une trilogie.
Il existe une compilation Super Nintendo qui regroupe tous ces classiques. Elle porte le nom explicite de Super Mario All-Stars + Super Mario World. L'affaire est close.
Cette singularité confère à la trilogie NES un caractère presque sacré, un peu comme la première trilogie Star Wars, tenue en si haute estime. Mais contrairement au cinéma, qui essaie et échoue lamentablement à reproduire son triomphe, je crois que Nintendo a conscience de la nature particulière, « bénie » , de cette première trilogie. S'ils ne tentent pas d'en refaire une autre, ce n'est peut-être pas par superstition, mais c'est au moins par respect et puis par conscience de leur propre limite. Mario a beau avoir traversé depuis des centaines de niveaux en 3D ou en fausse 2D, sur des consoles infiniment plus puissantes, ce n'est plus la même chose qu'au temps de la NES et cela ne pourra plus jamais l'être.
Appendices
Tilt, ou : Il ne fait pas bon être une console en 1987
Dévoué aux ordinateurs, Tilt vit venir l'arrivée des consoles depuis les salons américains (les CES de Las Vegas et Chicago, en hiver et au printemps), où ils purent juger de leur immense succès autant là-bas qu'au Japon. Cependant, jamais ils ne parvinrent à s'enthousiasmer pour elles, les pressentant plutôt comme une menace pour leur marché des « microloisirs », qui se mordait pourtant la queue depuis un moment, saturé de clones et de ratages.
Quand l'automne de 1987 haussa ses couleurs, Tilt parla aussi peu de la NES qu'ils le purent, ce qui était assez facile vu leur formule rebutante (beaucoup de tests vite-vus coincés entre des articles fourre-tout, l'ensemble écrasé sous des monceaux de pubs), lui préférant de toute façon la Master System pour toutes les mauvaises raisons. Ils furent indifférents à Super Mario Bros, lui offrant par charité trois phrases en bout de page, se perdant en louanges sur le misérable 1942 (qui au final ne fut pas commercialisé en France, ou alors si discrètement qu'il n'en reste plus aucune trace), simplement parce qu'il avait déjà été adapté sur ordinateurs en moins bien (il ne devait pas être joli !).
Ce qui transpire au travers de leurs « critiques » est leur obsession des ordinateurs, de l'héritage arcade et leur incapacité à penser au-delà. S'ils déclaraient prématurément Sega vainqueur, s'ils préféraient 1942 et, comble du ridicule, Donkey Kong à Super Mario Bros, c'est parce que ceux-là existaient déjà sur leurs supports de prédilection. La nouveauté de Super Mario ne leur inspirait aucune curiosité, aucun émerveillement, uniquement de la défiance. C'est à se demander s'ils y avaient même touché tant leurs commentaires étaient creux. Ils ne lésinaient pas sur les inepties : « aussi médiocres que celles de Sega (...) peu ergonomiques et peu pratiques, ces manettes s'avèrent imprécises et désagréables. » Insistant qu'un manche à balai aurait été nettement plus efficace pour jouer à des jeux tels que Super Mario ! Stupidité quand tu nous tiens...
A la même époque, de nouveaux mensuels furent lancés tels que Génération 4 et Micro News. On aurait pu croire que les consoles motivaient leur création, mais en réalité, là encore, les ordinateurs restaient de loin leur matière première. Génération 4 se montra tout de même beaucoup plus éclairé que Tilt en repérant tout de suite les hits de Nintendo (Super Mario, mais aussi RC Pro Am, Kid Icarus, Metroid et Zelda) et en y goûtant avec un plaisir non dissimulé. Quant à Tilt, leur aveuglement frôlait parfois la suffisance. Quand un lecteur perspicace leur demandait s'il existait une revue spécialisée sur les consoles, ils lui répondaient que non, qu'il n'en existait pas. « Mais nous sommes là, non ? » concluaient-ils.
Cela équivalait à dire que les curieux des consoles devraient se contenter de la mauvaise tambouille qu'on leur servait. N'ayant rien d'autre à se mettre sous la dent, ils allaient devoir prendre leur mal d'information en patience.
De 1988 à 2018 : Grandeur et Décadence
Les temps ont bien changé. Quand Mario attrapait une figurine sautillante pour se retrouver soudain dans un costume, c'était une nouveauté épatante. On en félicitait Nintendo, car il fallait penser à un tel mécanisme de jeu et à des déguisements aussi drôles ! Un raton laveur pour voler ! Et puis leur nombre, leur apparence restaient limités, raisonnables. Dans les jeux suivants, Super Mario World, Super Mario 64, Nintendo laissa déjà tomber le concept et passa à autre chose. Ce n'était pas de la fierté, c'était la liberté créative que procure le génie.
De nos jours, depuis la Wii, Mario s'est remis à enfiler des costumes; il prend toutes sortes d'apparences. Le voici qui emprunte l'accoutrement des ennemis, qui s'habille en chat, en pingouin, qui fait Maya l'abeille. Il est tout et n'importe quoi, un zoo vivant, comme son confrère Kirby qui imite tout ce qui lui tombe dans la bouche. C'est devenu absolument ridicule, au point que Nintendo ne semble plus avoir de considération pour son personnage. A regarder les illustrations, on croirait feuilleter un livre pour les tout petits.
Les enfants ont toujours été les principaux admirateurs de Nintendo, mais leurs jeux s'adressaient à tous, et, en grandissant, de l'adolescence jusqu'à l'âge adulte, on pouvait continuer d'y jouer et de les aimer sans en rougir. Est-ce encore possible aujourd'hui quand vous dirigez un Mario habillé comme un clown visitant une crèche ? Peut-on encore avoir du respect et de l'admiration pour ce Mario 3-D peinturluré de couleurs vives dont même Barbie aurait honte ?
Son univers même s'est fondu en guimauve. Du pastel on est passé à une 3-D plastique, tout est personnifié y compris l'inutile (le FLUDD de Super Mario Sunshine), les ennemis ressemblent à des peluches arrachées des bras d'un bébé, même les Pokémon ont plus de dignité, et on habille Mario et compagnie comme la collection de poupées d'une fillette. Ce qui ne l'empêche pas de se réjouir. Avant, sa gaieté s'exprimait seulement dans certaines situations, comme le vol; le reste du temps il vaquait à ses occupations héroïques. Maintenant, lui et son gang de bienfaiteurs semblent figés dans une expression de joie perpétuelle, souriant la bouche ouverte, les bras en l'air, dans des poses exultantes à s'en briser le moral.
Mais d'où vient ce style ultra-brillant dont Mario n'arrive plus à se défaire ? Le point critique a eu lieu au début des années 2000, entre la Nintendo 64 et la GameCube, c'est là que cet aspect lissé et éclatant s'est installé.
Alors qui est à blâmer, Super Mario 64 ou Super Mario Sunshine ? Eh bien, aucun des deux. La faute retombe sur un troisième larron, qui n'est même pas l'oeuvre de Nintendo : Mario Party ! On a longtemps pris ces jeux à la légère, mais ils ont connu un grand succès dû à la convivialité de leur formule jeu de plateau. Et petit à petit, ce sont eux qui ont infecté la série principale avec leur graphisme édulcoré ad nauseam. Dès le début, en 1999, Mario Party se démarquait de Super Mario 64 avec un ton plus fade. L'esthétique médiocre des Mario Party d'Hudson a déteint sur Nintendo. Il a infantilisé Super Mario et cela a fini par contaminer à peu près tous les jeux qui l'impliquent. La seule exception sont les RPG avec Mario (et Luigi) qui ont une esthétique cartoon, mais elle aussi assez éloignée des anciens volets.
On comparait Mario à Mickey Mouse dans le temps (du fait de sa popularité, uniquement), mais c'est plutôt à Winnie l'ourson qu'il ressemble désormais, tant son univers est différent de ce qu'il était à l'origine, tant il est devenu puéril. Et encore, je ne suis même pas sûr que Disney soit tombé aussi bas dans son rapport avec le grand public. Il y avait bien une ligne Disney Babies mais elle s'adressait aux familles d'un nouveau né (Nintendo a fait aussi son Baby Mario, Baby Bowser et toute la clique, mais c'est une autre histoire).
Sans doute ces mots paraîtront durs aux fans qui jouent sans discontinuer depuis 1987. Mais qui aime bien, châtie bien ! Et pendant longtemps il y a eu beaucoup à aimer dans les jeux Super Mario. Malheureusement, depuis un moment, on ne ne peut s'empêcher de penser que Nintendo se fourvoie à poursuivre dans cette direction. Autant ils expérimentent avec Zelda, autant ils restent ancrés avec Mario dans son style visuel « Party ». Et conservateurs comme ils sont devenus, ils n'ont pas de raison d'en changer, les Super Mario s'écoulent encore très bien. Chose incroyable, Super Mario Odyssey sur Switch s'est même mieux vendu que Zelda: Breath of the Wild, malgré l'immense publicité qui a entouré le second (11.2 millions contre 10.6, en incluant les ventes Wii U).
On a cru voir venir un changement avec ce Super Mario Odyssey, qui se déroule notamment dans une ville, New Donk City, en fait le pseudo-New York des Donkey Kong et Mario Bros originaux, revisité 35 ans plus tard. Mais ce n'était apparemment qu'une fausse alerte. Mario porte encore plus de costumes, sa casquette est vivante, certains passages sont d'un blanc éclatant, d'autres d'un rose gélatineux. C'est moins écoeurant que les New Super Mario Bros et autre Super Mario 3D World, c'est vrai, mais ce n'est pas le Mario qu'on l'imaginait devenir quand on le guidait dans ses fabuleuses aventures sur NES.