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La malédiction Dragon Ball, ou comment les jeux vidéo malmènent un super manga depuis des années.

Dragon Ball - Le Secret du Dragon

Dragon Ball - Le Secret du Dragon

ドラゴンボール 神龍の謎 (Dragonball - Shenron no Nazo, trad: "Dragon Ball - Le Secret de Shenron")
Dragon Power (USA)
Suppléments:

Dragon Power, la Version US

 NES

Développeur:
Bandai

Editeur:
Bandai
Genre:
Action / Aventure

Joueurs:
1P

Dates de sortie
27.11.1986 Japon
03.1988 USA
198? Europe
horrible Difficulté:

39%Graphismes
55%Animation
47%Son
70%Jouabilité
58%Durée de vie

30%30%
Trucs et astuces

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Appuyez sur B de la seconde manette.

Recharger ses vies:

Appuyez sur bas de la seconde manette. Au-delà de 255 points de vie, vous revenez à zéro et donc mourrez.

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Pour tout vous dire, Sangoku était impatient de nous rejoindre sur 1UP, lui qui a une si longue histoire de jeux vidéo sur consoles. Et puisque nous sommes bien ordonnés, c'est bien évidemment avec la toute première de ses aventures que nous commençons, la seule en fait à être sortie sur NES en occident bien qu'il en existe huit en tout et pour tout au Japon. Tout comme Les Chevaliers du Zodiaque, la popularité de la série se traduisit, eh bien, par une traduction. Bandai sortit cette version de Dragon Ball dans leur terrible français extra-terrestre. Heureusement pour nous, pauvres lecteurs d'écran, il y a moins de texte à subir que dans Les Chevaux Alliés du Sot Yack puisque le jeu est essentiellement orienté action. En avant donc pour un test, pendant que Sangoku se livre à une fouille minutieuse du site, bien évidemment à la recherche d'une Dragon Ball.

Qui dit Bandai, dit mauvais jeu. Paf, dans les dents. Le fait est que les choses commencent très mal pour Dragon Ball, suffisamment mal pour ne rien sauver de la réputation de Bandai. Les graphismes sont loin d'être fantastiques, même si, il est vrai, à l'époque, conjugué à la réputation phénoménale du dessin animé, il n'en fallait pas plus pour nous séduire. Avec sa vue de dessus, ses sprites étranges et ses mondes variés, Dragon Ball avait un petit côté Zelda, et l'idée de se retrouver à jouer à un jeu mélangeant les deux styles n'était pour déplaire à personne. Un système, original pour l'époque, de scènes intermédiaires non jouables faisait même son apparition, et l'on pouvait y retrouver des moments clefs du dessin animé.

Seulement, ce qui en théorie promettait un nouveau titre réussi dans la ludothèque de la NES, cachait en réalité bien des déceptions. Les graphismes, donc, étaient loin d'être fantastiques, ou, l'euphémisme mis de côté, étaient carrément moches. Bien sûr, avec la NES, il ne fallait pas s'attendre à des miracles, mais il y avait tout de même des critères de qualité, y compris pour les premiers jeux, auxquels Dragon Ball ne répondait pas du tout. Le pire de tout peut-être était à quel point l'univers de jeu se démarquait radicalement de Dragon Ball, le dessin animé, ou maintenant que nous le connaissons, le manga. Les ennemis lambda que Sangoku rencontre ne ressemblent à rien de familier, et sont surtout d'un mauvais goût intolérable. Des poupées mauves et des chiens roses, d'où est-ce qu'ils sortent ça ?

Les décors non plus ne sont pas fidèles, il n'y a que les maisons blanches du troisième niveau qui ont un petit quelque chose de Dragon Ball, mais surtout, plus on avance, plus la qualité se détériore. Justement passé ces maisons, les environnements se répètent trop, puis, vers la base de Pilaf, s'appauvrissent considérablement et sombrent dans l'affreux et le ridicule après la première recontre avec le dragon Shenron. A partir de ce point, les graphistes ont épuisé leur réserve de bon sens et se lâchent dans des conceptions d'une laideur épouvantable, proches du cubisme et extrêmement peu travaillées. Souvenez-vous de la mer, représentée par une surface bleue à points blancs, et de la tour rouge et grise, avec sa structure incomprenable manquant de relief. La différence de qualité saute vraiment aux yeux quand on compare ces niveaux au premier.

Quant aux cinématiques d'avant-garde, censées assurer le clou du spectacle, là encore c'est un échec complet. La taille et la variété des personnages est certes satisfaisante, mais leur dessin est bien souvent raté alors que l'animation par saccades achève de ridiculiser l'ensemble. Bulma ressemble à une poupée gonflable et bouge de façon aussi obscène, tandis que ce Yoshimitsu enfant n'est autre que Sangoku, mal dessiné. Et puis bien sûr, il y a les dialogues. On ne parlera même pas du fait que toutes les requêtes perverses de Tortue Géniale (qui ne pense qu'à peloter des seins) aient été remplacées par des demandes de sandwiches, ce qui donne des dialogues et des scènes absolument irrationnels ("Tu en veux plus ? C'est bon ? - Super oh il y a plein de lacs"). Le pire demeure la qualité et la cohérence même de ces phrases mises bout à bout, on se croirait en train de lire une histoire écrite par une classe maternelle.

Le constat du désastre ne s'arrête malheureusement pas là. Revenons sur les sprites, et sur celui du héros en particulier qui est une tragédie à lui tout seul. Aucune des différentes poses de Sangoku n'échappe au ridicule. Prenez sa façon de marcher, pourquoi marche-t-il en crabe ? Pourquoi des fois son bâton magique a la couleur de sa peau au lieu de sa tunique, en sorte qu'il semble agiter son pénis sur les ennemis ? Et pourquoi aussi des pans de décors ont des couleurs en commun avec des personnages, les deux se fondant pour donner des résultats incongrus ? Pourquoi le Kamehameha ressemble au triple Batarang de Batman ? Pourquoi les items sont-ils si minuscules ? Bref, pourquoi tant de mauvais choix, et, à plus forte raison, pourquoi ce jeu ? Si vous faites partie de ceux qui ont découvert le premier Zelda par émulateur ou Classic NES Series et ne comprennent pas ce que les vieux cons rétro comme nous (NDL: euh, non, juste toi) lui trouvent de génial, jouez à Dragon Ball, et le contraste entre les deux jeux fera lumière sur votre incompréhension (NDL: contraste, lumière... ohlala, où va-t-il chercher tout ça ?).

Il n'y a guère grand chose à défendre du point de vue de l'animation et du graphisme, et ne croyez pas que ce soit mieux dans les autres domaines. Ni la maniabilité, ni le gameplay sont exempts de défauts. Le manque de précision est flagrant, les ennemis vous touchent aisément, alors qu'il est bien plus difficile de vous placer correctement pour porter un coup, vous devez aligner votre poing ou votre bâton avec le sprite de l'ennemi et pas simplement votre personnage. Lorsque la vue devient latérale pour les combats de boss, la maniabilité devient plus effroyable encore, avec un test de collisions complètement erroné, vous recevez des coups même en vous tenant à une bonne dizaine de pixels de l'arme adverse.

Comme si tout cela ne suffisait pas, Dragon Ball: Le Secret du Dragon est à la fois, long, très difficile et vite ennuyeux. Un vrai petit cocktail molotov pour vos nerfs. Les dix niveaux que l'on traverse ne sont pas grands, mais tout de même longs à finir, parce qu'il y a toujours des bidules à ramasser à droite et à gauche, et parce qu'il faut être très prudent avec ses vies qui s'égrènent au rythme du temps, sans raison valable, et fuient comme de l'eau dans un tonneau percé lors des combats. Quand on compare ça à la façon dont Sangoku se faisait démolir à chaque épisode du dessin animé avant de massacrer ses adversaires, soudain empli d'une énergie destructrice, il n'y a pas de doute que le Sangoku de Bandai est une mauviette et une mauvaise reproduction de l'original.

Encore que... il y a bien moyen de reproduire l'invincibilité de la série dans le jeu grâce à la fameuse astuce de la seconde manette, à lire sur votre gauche. La question est, y-a-t-il quelqu'un qui ait réussi à finir ce jeu sans utiliser ce code une seule fois ? Pensée inadmissible face aux faits accablants que sont: le manque de confort matériel (pas assez de recharges d'énergie), la futilité de la vie (trop de game over), l'agressivité d'autrui (ennemis fortissimo), les nombreuses imperfections du monde qui nous entoure (bugs-à-gogo) et l'évolution décadente de notre existence (difficulté exponentielle). Quel philosophe ce Goku ! Quant aux voeux du dragon à mi-parcours et à la fin, c'est une plaisanterie à la hauteur du projet; une facon cynique de boucler le jeu sans rien boucler du tout, laissant le joueur bouche bée devant un tel tour de cochon, pardon, de Oolong.

Parlons un peu des bruitages et de la musique maintenant. Ah, musique... il est temps de sortir Ariane ! Quoi, la mythique fille de Minos ? La fusée ? Non, Ariane la casserole: "Draaagon Ball, la quête finale des sept boules de cristaaaal !" Il y a deux musiques dans le jeu, la fameuse mélodie de Sangoku, qui symbolise toute son énergie et sa bonne humeur, jouée de deux façons différentes, normale, à l'écran titre, et lente, durant les scènes de dialogue, et puis la musique des niveaux. C'est la même musique, à peine quelques notes, que vous entendrez, entendrez, et entendrez encore ad nauseam. S'il était possible de vomir par les oreilles, la musique de Dragon Ball serait sans doute capable de produire un tel effet. Avec ça, on se prend à rêver de la belle voix d'Ariane. Allez, encore un petit coup pour la route: "Draaaaagon Ball, combat glacial du bien contre le maaaaal !"

Ce premier Dragon Ball est un vaste, un colossal foutage de gueule de la part de Bandai qui semblait vouloir vendre ses jeux à un public aveugle, sourd et muet (pour être sûr qu'ils ne se plaignent pas). Eh bien, au moins, on sait désormais qu'en 1986, il y avait un million deux cent milles aveugles sourds-muets au Japon puisque c'est le chiffre miraculeux de vente que ce caca sur pattes (Arale serait contente) est parvenu à accomplir. De ce fait, de nos jours, le jeu figure encore dans le top des cent jeux vidéo les mieux vendus de tous les temps au Japon, à la quatre-vingt dixième place. Une position honteuse pour un titre pareil ! Et une preuve incontestable et indélébile, inscrite à jamais dans l'histoire des jeux vidéo, que le public est bête et se laisse prendre au piège par les produits qui portent le nom de ce qu'il aime, aussi minables et ridiculement mauvais soient-ils.

Mais à l'époque, la chose reste encore compréhensible et excusable pour deux raisons: tout d'abord, les gens n'avaient pas autant accès à l'information sur les jeux vidéo qu'à notre époque, où la réputation des hits et des navets précède leur sortie, ensuite, toujours à mettre sur le compte de l'époque, tout était réuni pour créer un tel succès. Nous n'étions qu'en 1986, la Famicom était toute jeune et à ce titre Dragon Ball n'était pas si vilain qu'il nous apparaît avec le recul, il faisait même plutôt bonne figure, vu que Zelda sortit la même année tournait, lui, sur Famicom Disk System. Et puis, bien évidemment, il y avait le fantastique succès du manga et du dessin animé à la télé pour renforcer cela. Nous autres Français en savons quelque chose...

L'oeuvre d'Akira Toriyama est née pour être adaptée en jeux vidéo, elle s'y prête bien parce qu'elle est facilement transposable dans un genre. Lui-même est un adepte des jeux, et son travail, de Dragon Quest à Chrono Trigger est irréprochable, tout à l'inverse de l'adaptation de son oeuvre, si souvent massacrée par Bandai et d'autres. Dragon Ball: Le Secret du Dragon, peut-être le tout premier martyr du lot, demeure le symbole de ce gaspillage et un avertissement pour les titres à venir. Même si aucun ne sera aussi mauvais que celui-ci, véritable insulte pour les jeux et le manga, il montre avec fracas que pour faire un grand jeu d'un grand succès, il faut d'abord savoir faire des jeux.

le 8 juillet 2005
par sanjuro



Jeu testé en version française
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Version française



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