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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE SUPER NINTENDO (16-bit)


Bien avant les jeux de course, il y avait les voitures miniatures.

Micro Machines

Micro Machines

Suppléments:

La Liste des Courses

 Super Nintendo

Concepteur:
Codemasters

Développeur:
Merit Studios

Editeur:
Ocean
Genre:
Course

Joueurs:
1-4P

Dates de sortie
12.1994 USA
1994 Europe
très dur Difficulté:

79%Graphismes
80%Animation
57%Son
77%Jouabilité
79%Durée de vie

72%72%

Avant les jeux vidéo, il y avait (et il y a toujours) les jouets. Parmi ces jouets, il y a les voitures miniatures, celles de collection, qu'on ne touche pas trop au début mais qu'on finit toujours par casser à la fin, et puis les autres, plus résistantes, juste pour jouer. Les Micro Machines étaient d'un genre à part, minuscules, comme leur nom l'indique, et surtout, ce dont je me souviens personnellement, hors de prix. Ces crottes en plastique coûtaient aussi cher que des pépites ! Leur coût prohibitif et les publicités incessantes à la télé sont le seul souvenir que j'en garde. Désolé donc, aujourd'hui je ne pourrais pas vous assommer de mes souvenirs d'enfance.

Le jeu vidéo des Micro Machines est une autre affaire. Curieusement, les jouets sont presque un sous-genre à part entière des jeux vidéo et un sous-genre un peu pervers avec ça, car, vraiment, quel intérêt de faire des jeux de quelque chose d'aussi accessible que les jouets ? Est-ce pour les adolescents qui ont désormais trop honte de se rouler par terre en faisant des bruits d'explosion ? (Certains adultes le font aussi ! ... Non, non, ne me regardez pas comme ça !) A quoi bon, franchement ? Cela semble être le comble du manque d'imagination, comme on peut le voir avec les jeux vidéo LEGO qui pullulent depuis quelques années maintenant. Mais qu'on ne se trompe pas, eux non plus n'ont rien inventé, cette tendance existe depuis longtemps. On l'avait vu avec Monster in my Pocket sur NES, on pourrait aussi parler des Crash Dummies et des Trolls sur Super Nintendo ou de tous les jeux Barbie. Qu'on l'aime ou non, les jouets sont une tradition des jeux vidéo.

Les Micro Machines sur consoles se présentent évidemment comme des jeux de course, avec des voitures et d'autres véhicules puisque les jouets n'étaient pas limités aux quatre roues. Il a été adapté sur une foule de supports, mais le jeu d'origine vient en fait de la NES. C'est une production britannique, programmée à la base par Codemasters, qui connaîtront plus tard un grand succès avec leurs jeux de touring et de rallye. La version Super Nintendo cependant n'a pas été prise en charge par eux, elle a été développée par Merit Studios et publiée par Ocean. Merit était une compagnie américaine, mais c'est leur filiale britannique qui est l'auteur du jeu. Aujourd'hui, ils sont connus sous le nom d'Eutechnyx et ne développent depuis plus de dix ans que des jeux de course automobile !

Micro Machines est un jeu très direct. On choisit son mode de jeu, son personnage, et on enchaîne les courses. C'est fini ? Bravo, on recommence. Ou pas. C'est selon. Il se démarque par sa vue de dessus, qui n'a jamais été immensément populaire pour les jeux de course mais a quand même donné lieu à pas mal de titres (Road Fighter sur NES et les Moto Roader sur PC Engine, pour n'en citer que deux). Cette vue a de sérieuses limitations, la principale étant qu'on ne voit jamais plus loin que les bords de l'écran, ce qui rend les virages difficiles à anticiper, mais dans le cas présent, elle se prête assez bien à l'action. C'était la perspective d'usage dans certains jouets automobiles, ce qui est de circonstance, et puis surtout, elle permet de bien représenter les circuits.

En effet, les véhicules étant minuscules, ils traversent des décors familiers gigantesques. Un thème classique des jouets en jeux vidéo (voir de nouveau Monster in my Pocket). Chaque Micro Machine a son propre niveau, décliné en trois circuits. Le tracé change évidemment, mais les éléments du décor très peu. Les 4x4 font la course sur la table du petit déjeuner (le parcours est minutieusement délimité par des Cheerios), les warriors, des voitures inspirées de Mad Max, entre les boulons et les taches d'huile d'un garage, les hors-bords dans le bain mousseux, les buggies à la plage. Il y a huit véhicules comme ça, et donc autant de niveaux pour un total de vingt-huit circuits, lorsqu'on y ajoute les courses bonus en rufftrux.

Seul, on a le choix entre deux modes: la compétition (Challenge) et un face à face (Head to Head). Mauvaise surprise dans les deux cas, pour remporter la victoire, il faut disputer la totalité des circuits à la suite ! On possède des vies, mais rien d'autre. Un bon conseil pour les gens pressés: mieux vaut commencer par le face à face. Dans ce mode, contrairement à l'autre, vous n'êtes pas requis d'effectuer trois tours de piste complets pour gagner. Tout ce que vous avez à faire est de créer suffisamment d'écart entre vous et votre adversaire pour toucher le bord de l'écran le premier et recevoir ainsi un point bonus. Vous commencez avec quatre points chacun et le but est d'empocher tous ceux de votre rival. Ce n'est pas toujours facile, loin de là, mais au moins on a la possibilité de couper au plus court.

La compétition se joue, elle, contre trois autres Micro Machines et le seul moyen de gagner est de passer la ligne d'arrivée premier ou second. On choisit ses adversaires au préalable, qui seront graduellement remplacés afin de jouer contre chacun des onze personnages. Une particularité de ce mode sont les niveaux bonus, bien gratinés comme le reste. On en reçoit un en récompense toutes les trois victoires. On y pilote un monster truck, un 4x4 avec des roues énormes qui a ses propres shows aux Etats-Unis. Bien évidemment, il est ici à une échelle lilliputienne et doit circuler dans un jardin, en faisant tout spécialement attention aux points d'eau qui le stoppent net. Si l'on parvient à traverser ce jardin des supplices avant la fin du chrono, on nous offre une vie.

Mais la réputation de Micro Machines tient surtout à un domaine précis: le jeu à plusieurs. Si vous vous souvenez des magazines de l'époque, en particulier Player One et son petit frère Nintendo Player, vous savez que Micro Machines était un chouchou des rédactions pour cette raison. Il possède en effet non seulement un mode à deux, mais encore un pour trois et quatre joueurs (et même huit, dans sa suite Turbo Tournament !). Ces deux derniers modes sont exclusifs à la Super Nintendo et offrent un système novateur de contrôle qui permet de jouer sans multitap (l'accessoire pour quadrupler un port manette). Deux joueurs doivent se partager un joypad, dont chaque moitié permet de diriger un véhicule à l'écran. Pour que cela fonctionne, l'accélération est permanente, L (ou R) sert à freiner et Haut et Bas (ou A et B/X et Y) à tourner. C'est une idée sympathique, en particulier pour tous les joueurs pauvres ou radins de la planète, mais on aurait quand même bien aimé que le multitap soit reconnu !

Si les rédactions françaises et les joueurs éthiopiens de Super Nintendo remercient encore Codemasters, nous serons plus circonspects sur les mérites du multijoueurs. Toutes les courses se jouent bien sûr en Head to Head, à celui qui touchera le bord le premier, et le tournoi se dispute sur une poignée de circuits choisis au hasard. C'est assez distrayant, on ne peut le nier, mais ça ne vaut pas un vrai jeu de course. Super Mario Kart était déjà sorti, et même si on ne pouvait jouer qu'à deux, on sera revenu plus volontiers vers lui. Le plaisir de jeu dans Micro Machines, et c'est vrai aussi en solitaire, est trop simpliste. On a l'impression de prendre part à un mini-jeu, un mini-jeu avec une tonne de circuits, de véhicules et de personnages, pour se donner l'apparence d'un vrai jeu bien sérieux, mais un mini-jeu quand même. Micro Machines, micro jeu.

Il faut voir aussi les fins, ou plutôt la fin. Quel que soit le mode qu'on termine, challenge ou face à face, seul ou à plusieurs, on reçoit toujours le même écran merdique avec la coupe, qui nous renvoie ensuite au début. Rien de plus, aucun effort supplémentaire malgré celui qu'on vient de fournir. Mais il y a un autre problème par dessus le manque de substance de Micro Machines, c'est l'inégalité de sa jouabilité. Chaque véhicule répond différemment. Certains sont plus rapides que d'autres ou accrochent mieux à la route. Très bien, c'est réaliste. Le tank par exemple est le plus agréable: il est lent, se contrôle avec précision et on peut même tirer sur les autres chars. Mais quand on tombe sur l'hélico, le buggy ou la voiture de sport, bonjour l'angoisse ! La voiture surtout a un dérapage invraisemblable. Il est tel que lorsqu'on tourne de quatre-vingt-dix degrés pour prendre un virage, le véhicule, maintenant de côté, continue d'aller tout droit sans qu'on puisse rectifier sa trajectoire, généralement pour aller tomber dans le vide, son niveau se jouant au sommet de tables recouvertes de fournitures scolaires, reliées entre elles par des règles étroites.

La difficulté montant progressivement mais rapidement au gré de la trentaine de circuits du jeu, on en arrive vite à l'auto-mutilation (s'arracher les cheveux) ou au vandalisme (balancer la manette dans le téléviseur, puis la console par la fenêtre). Micro Machines ne déroge pas à la "règle des trois" des jeux Ocean, qui est souvent aussi celle des jeux britanniques de cette époque: trop dur, injouable et infinissable. La solution ? Car il y a quand même moyen d'alléger un peu ses peines: apprendre les circuits par coeur et ne jamais adopter la vitesse maximale. C'est peut-être la contradiction suprême de Micro Machines, celle qui lui coûte le plaisir de jeu. La vitesse nous fait perdre le contrôle et à cause de la vue, nous fait voir les virages trop tard. Un jeu de course auquel on ne peut pas jouer spontanément, ni à pleine vitesse, est l'antithèse d'un jeu de course.

Et là, je crois que tout est dit. Moins qu'un verdict, c'est la conclusion d'un raisonnement. C'est pourquoi aussi le mode multijoueurs passe mieux: en général, tout le monde joue aussi mal ! Du coup, les deux défauts mentionnés ne sont pas aussi gênants. L'ordinateur lui ne roule pas à toute berzingue, sauf avec les véhicules sans roues, ce qui fait qu'on le dépasse assez facilement, mais c'est aussi ce qui lui permet de ne jamais faire d'erreur (à moins d'un petit coup de pouce de notre part...). Une autre source de mécontentement est la façon dont les voitures s'accrochent au décor, comme de la bardane sur de la laine. Plus celles-ci sont larges, plus on a de mal à se dégager.

On aimerait finir sur une note positive, avec la technique, mais là non plus il n'y a pas de quoi s'emballer. Les bolides vont vite, c'est vrai, il n'y a aucun ralentissement, mais c'est parce qu'à l'exception du second plan qui symbolise le vide, rien n'est animé ! Tous les niveaux sont statiques et ne sont pas d'une beauté frappante. Il y a des détails attrayants dans les éléments du décor plus que dans le décor même, les gaufres entamées, les carnets griffonnés, les queues de billard en travers de la table, mais le jeu profite surtout de nous faire évoluer dans un monde géant. Ca marchait bien dans Super Mario Bros 3, ça marche toujours ici. Le son est une déception puisqu'il n'y a pas de musique et que les ronronnements contrariés des moteurs finissent par fatiguer.

Il y a quand même une chose que j'aime beaucoup, mais c'est tellement subjectif que j'ai un peu de mal à la présenter comme une qualité; il s'agit des personnages. Les illustrations des vignettes qui présentent chaque mode sont amusantes, mais ce sont surtout les onze pilotes, de jeunes ados, qui retiennent l'attention. Leur frimousse est sympathique et ils ont deux petites animations rigolotes. En tant que personnages principaux, ils fonctionnent très bien, je trouve. On les imaginerait facilement dans leur propre jeu ou dessin animé. Eux ont de la personnalité, rien à voir avec les fades visages des Mii.

Pour résumer, ce premier Micro Machines sur Super Nintendo n'est pas aussi amusant qu'on voudrait nous le faire croire, même à plusieurs. Il a ses bons moments, mais le challenge solo est trop long et le manque de volonté des auteurs trop apparent. Les versions 16 bits se contentent d'adapter le jeu NES sans vraiment chercher à en enrichir le gameplay comme elles le pourraient. Le graphisme a été refait, une obligation, et on peut désormais jouer à quatre en se tordant le bras, mais que gagne-t-on vraiment en plus ? Ah si, une chose, une jouabilité effroyable sur certains véhicules ! Et là, c'est sans doute Merit Studios qu'il faut blâmer, pour avoir poussé à l'excès certaines caractéristiques sans en mesurer les conséquences. Sur NES et Mega Drive, lorsque Codemasters programme, les dérapages sont quand même moins ridicules.

Donc finalement, les p'tites tutures répondent mieux quand on a la main dessus à marmonner des vroum-vroums. On vous l'avait bien dit qu'il fallait laisser les jouets tranquilles !

le 24 septembre 2012
par sanjuro



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