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Super NES Développeur: Neverland Editeur: Taito
Genre: RPG Joueurs: 1P Dates de sortie
25.06.1993 Japon
12.1993 USA
bonne Difficulté:
75%Graphismes 71%Animation 85%Son 88%Jouabilité 95%Durée de vie 76%76%
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On aurait pu les prendre pour les Cavaliers de l'Apocalypse. Ils étaient quatre, ils ne sentaient pas bon le sable chaud comme les légionnaires, mais empestaient le sang et la chair calcinée. Sous le signe de la destruction, de la terreur, du chaos et de la mort, ils accomplissaient leur quête du mal. On les appelait "The Four Sinistrals", quelque chose comme le Sinistre Groupe des Quatre ou les Quatre Maléfiques. Ils apparurent en même temps qu'une île flottant dans les cieux où ils élurent domicile. Leur règne fut chargé d'effroi. Heureusement, ils ne sont plus. Ils furent détruits par quatre héros, Maxim, Selan, Guy et Artea, qui leur livrèrent une ultime bataille dans leur forteresse sur Doom Island. Maxim et Selan y laissèrent leur vie. L'histoire devint légende et le temps emporta la légende. Cent ans se sont écoulés, tout semble bien terminé, et pourtant tout ne fait que commencer. La rumeur que des monstres ont attaqué le château de Sheran parvient jusqu'à la ville d'Alekia. Personne ne semble s'y intéresser, pas même la garde royale; après tout, cela fait des décennies qu'on n'a pas vu de monstres rôder. Seul un tout jeune chevalier prend la nouvelle très au sérieux, trop sérieusement au goût de son amie. Quand celui-ci est décidé à partir, elle veut le suivre. Mais qui est vraiment cette jeune fille, orpheline recueillie par Roman le tavernier, et qui porte le doux nom de Lufia ? Pour empêcher la réapparition de Gades, Amon, Erim et Daos, les Sinistrals, notre couple de héros devra traverser les six continents qui composent leur monde, s'adjoindre l'aide de deux compagnons de voyage chamailleurs, le commandant Aguro et la demi-elfe Jerin, et rechercher l'épée légendaire Dual Blade dont Maxim s'était servi pour triompher. On dit qu'elle repose toujours là où elle fut utilisée pour la dernière fois, dans la forteresse de Doom Island, désormais au fond des océans, où elle sombra après la défaite de ses maîtres. Il n'y a pas à dire, Lufia se présente bien. Ses auteurs, grâce à des touches d'originalité injectées discrètement dans une traditionnelle histoire de bien contre le mal, évitent de fouler de plein pied des sentiers déjà bien battus. On comprend cela dès le début, où, en guise d'introduction, les premières minutes jouables nous mettent dans la peau de Maxim et ses amis livrant leur ultime bataille contre les Sinistrals. Néanmoins, Lufia & The Fortress of Doom vient d'une époque antédiluvienne, pas aussi ancienne que les 8-bit, et pourtant ! Le poids des années semble l'avoir touché plus durement que ce n'est le cas pour bien des classiques de la NES. A vrai dire, son support est ici bien nommé: avec Lufia, la Super NES ne se montre ni plus ni moins que comme une NES améliorée, capable d'afficher plus de couleurs, une meilleure résolution et plus de sprites, mais pas comme la véritable étape suivante que les jeux vidéo attendent alors, quand bien même ce furent les RPG qui exploitèrent la console avec une redoutable efficacité. Lufia ne se situe pas au même niveau que les Tales of Phantasia, Secret of Mana, Star Ocean. C'est la génération précédente, qui mise amplement sur les bases du genre: les combats, l'exploration, et l'aspect gestion de personnages, sans vraiment donner un autre rôle au scénario que celui de fil conducteur. Inévitablement cela se traduit par de la lassitude, le schéma devenant aussi clair que celui d'un beat'em up: combattre pour augmenter ses niveaux, s'enfoncer dans la caverne ou escalader la tour, battre le boss, et aller à la ville suivante. Il y a bien des petites histoires qui viennent se greffer sur la trame principale, mais elles sont inconsistantes et uniquement là pour obliger à aller dans les souterrains, comme le vol du "Hope Ruby" ou le sacrifice de Jerin. On retrouve ainsi un défaut mineur de RPG, une habitude fatigante, que nous avions déjà évoquée dans le test de Breath of Fire. Pour comprendre de quoi il s'agit, un exemple suffira. Vers la fin de Lufia, vous devez rapporter 7 morceaux d'Alumina, un métal précieux. Mais vous devez d'abord trouver un dénommé Brant qui connaît l'emplacement des filons. Seulement, Brant n'est pas là où il devrait être, près de la ville de Linze. On vous dit qu'il est parti dans la ville de Marse retrouver son amie. Quand, après bien des batailles, il ne vous manque plus qu'un morceau d'Alumina, on vous fait savoir indirectement que c'est auprès du roi d'Hérat que vous devez l'acquérir. Comme il ne cédera pas son trésor au premier venu, il faut le soudoyer avec un mets extraordinaire, que vous ferez préparer auprès du Wizard of Taste (le Sorcier du Goût) de la ville de Lyden; il vous demandera d'abord de lui procurer une salamandre pourpre, ingrédient indispensable à la préparation d'une potion. Et quand enfin on a obtenu son septième morceau, après des heures de jeu, c'est à peine si on se souvient pourquoi on le recherchait et où l'apporter... Lufia est un jeu très long. C'est un avantage considérable pour la durée de vie mais qui doit beaucoup aussi à ses deux grands défauts, les combats et la géographie. C'est à cause d'eux que les errances que nous venons de décrire peuvent prendre une tournure agaçante. Parce que le graphisme du monde est à la fois simple et immense, qu'il y a un nombre considérable de villages qui se ressemblent presque tous, s'orienter tient du cauchemar. Si l'on vous demande d'aller dans tel ou tel hameau, puisqu'il n'y a pas de carte à proprement parler condensant tout en quelques écrans, que des jours entiers peuvent séparer le passage dans un lieu, il arrive qu'on se sente complètement perdu, sans la moindre idée où aller, sans savoir si l'on nous parle d'un endroit qu'on a déjà visité ou non. Plus tard, on obtient un bateau, on pourrait croire que c'est utile pour s'y retrouver, mais non, tout le pays étant devenu accessible, on passe encore plus de temps à tourner en rond et à combattre. Et c'est ce dernier point surtout, les combats, qui nuit décisivement au jeu. Il y en a tellement, ils s'enchaînent si rapidement les uns après les autres, quelques pas suffisant à attirer l'ennemi, que toute l'exploration s'en retrouve submergée. Il n'y a que dans les villages où l'on nous fiche la paix. Aussitôt dehors, n'importe où, sur la carte, sur l'eau, sur le seuil d'une caverne, dans le recoin d'une tour, cela ne prend que quelques secondes avant que les monstres ne fassent leur apparition. Et un affrontement ne se liquide jamais aussi vite qu'on le souhaiterait ! Le système de combat est bien réalisé mais il manque de souplesse, et vu la fréquence à laquelle on enchaîne les bataille, c'est un défaut qui devient vite pesant. Comme d'habitude, il faut sélectionner la méthode d'attaque pour chaque personnage, puis le groupe de monstres qu'on vise avant de laisser l'ordinateur riposter. Il n'y a malheureusement aucune fonction auto, aucun moyen d'abréger les attaques ou d'accélérer les combats, même les plus insignifiants. Et puis surtout, des détails font traîner en longueur. On n'y prête pas attention au début, mais au bout de son millième duel, on ne voit plus qu'eux. Les sorts, offensifs ou défensifs, qui fonctionnent sur tout un groupe, sont appliqués individuellement, tour à tour. Dans un groupe d'ennemis du même type, vous ne pouvez pas choisir quelqu'un de précis, l'ordinateur choisit pour vous, préférant presque toujours épargner celui qui a déjà reçu un coup et mourrait pourtant d'un second. Enfin, plus stupide encore, si l'ennemi que votre personnage s'apprête à frapper a été tué au cours de l'assaut précédent, votre coup portera dans le vide plutôt que d'être dirigé vers ceux qui sont encore en vie ! Cela rend les combats ordinaires, en particulier ceux dans lesquels on est entraîné alors qu'on essaye désespérémment de trouver son chemin, terriblement fastidieux. Les niveaux d'expérience montant lentement, combattre fréquemment est cependant une obligation. Un tuyau qu'il est bon de connaître est que certains ennemis, rares, valent beaucoup plus de points d'expérience que d'autres. Recherchez les Redcores, les Greencores, et avant eux les monstres qui fuient en milieu de combat, tous ceux-là donnent considérablement plus de points, à peu près 12000 dans le cas des premiers. Bien utile quand on essaye d'atteindre le quatre-vingt-dix-neuvième niveau ! Rendez-vous compte, pour atteindre ce dernier échelon, il faudra accumuler près de sept millions et demi de points d'expérience ! Un autre défaut, mais celui-ci dans un registre totalement différent, est le style graphique. Exception faite des ennemis vu de près façon Dragon Quest, cela manque cruellement de variété. Les mêmes éléments graphiques, finalement peu nombreux, sont répétés sans cesse dans leur environnement respectif, qu'il s'agisse de la carte, des grottes, des tours, des châteaux ou des villages. Quand on en a vu un, on les a tous vus. Le graphisme est presque toujours le même, seule la composition change. Un excellent moyen de créer un très long RPG sur une toute petite cartouche ! Le joueur, lui, se réjouit moins de l'économie qu'il ne s'irrite de l'ennui de parler à des gens et de visiter des lieux qui se ressemblent tous et ne sont même pas beaux. Le style même, qui évoque un peu Pokémon sur Game Boy, très "kawaii", avec ses couleurs claires et ses petites poupées de personnages, ne convient pas toujours très bien au jeu. Quand le scénariste, dans des situations parfois lourdement mélodramatiques, s'essaye à prêcher la vertu et les bons sentiments par l'intermédiaire de ces nabots difformes, ses déclarations sentimentales s'effondrent aux pieds des joueurs, bien loin de toucher leur esprit. Grosse erreur de calcul, écran bleu dans le cerveau des concepteurs, car Lufia, avec son ton parfois très sérieux, ses combats intempestifs et ses drames pour soubrette, est un jeu qui semble mal s'accomoder d'une présentation si enfantine. Toutefois, grâce à des dialogues digne d'une chatroom (les "lol" en moins mais peu s'en faut) parsemés de blagues qui tombent à plat et de moments béats où l'on sent les facultés intellectuelles s'affaisser, le style graphique naïf finit par trouver son égal. D'autres vous parleront peut-être de poésie... Voilà plusieurs paragraphes que la pauvre Lufia s'en prend plein les dents. On l'imagine recroquevillée dans un coin de la pièce, pleurant à chaudes larmes sous ce déluge de remontrances. Il est temps de la consoler, de mettre notre bras autour de ses épaules et de lui murmurer à l'oreille pourquoi malgré tout on l'aime encore. Si on était dans un jeu d'action, elle nous aurait sans doute arracher la tête depuis longtemps, mais étant la douce héroïne d'un RPG, elle voudra bien nous écouter. Lufia & The Fortress of Doom a déjà l'excuse de son âge et d'un rappel: il aura fallu attendre assez longtemps, plus d'une année en tous cas, avant de voir poindre des RPG de grande qualité sur Super Famicom, même Square s'y était cassé les dents avec un Mystic Quest qui n'avait pas fait l'unanimité. Avec le recul, on aurait tendance à oublier qu'il n'y a pas que les shoot'em up qui ont démarré lentement sur la 16-bit de Nintendo. En outre, tout n'est pas à excuser dans Lufia, il y a aussi de bonnes idées et des choses bien faites. La gestion des personnages par exemple, claire et ergonomique malgré la variété d'objets que l'on peut transporter: six pièces d'équipement par individu, affectant sept caractéristiques uniques, soixantes items différents s'étalant sur cing pages et cumulables en large quantité. On se prendrait presque pour un marchand ambulant ! Les menus sont d'une sobriété qui insulte les lois de l'esthétique mais on arrive à faire rapidement ce que l'on souhaite, sans s'embrouiller, ce qui n'est pas toujours le cas des RPG. La seule chose qui fasse défaut sont des explications sur les sorts et les items, qui auraient été bien utiles, même si les premiers ne sont pas la force de Lufia et une grande majorité des seconds sont juste là pour être trouvés. En effet, le dernier écran du jeu est une liste qui dénombre certaines actions effectuées tout au long de l'aventure: morts, fuites, repos, combats, coffres ouverts (655 en tout) et donc items recueillis, parmi les 136 différents que le jeu compte. Comme avec d'autres éléments du jeu, la quantité de texte est massive. On a déjà critiqué sa qualité, mais il a quand même une particularité intéressante, celle d'avoir des dialogues plus dynamiques que ce qu'on voit d'ordinaire dans un RPG. On peut d'ailleurs parler de dialogues, dans la plupart des RPG, il s'agit plutôt du héros qui écoute ce qu'on lui dit. Ici, grâce à des bulles comme dans une bande dessinée, non seulement le héros parle, a une personnalité, mais les scènes sont fréquentes où des échanges verbaux ont lieu à la fois entre les quatre personnages de votre équipe et entre les villageois. Cela fonctionne si bien, d'une manière si naturelle, que l'on se demande pourquoi ce système n'a pas été plus souvent repris. La musique peut aussi figurer parmi les points positifs, avec tout de même une réserve. S'ils ne sont pas mauvais, les morceaux que l'on entend sur la carte, dans un combat, dans une grotte et dans un village, deviennent insupportables tant on entend souvent, constamment, leurs premières notes. Les bruitages, agréables au premier abord (joli effet du sort Succumb), finissent par produire la même aversion. Quelques-unes des meilleures musiques se trouvent être celles qu'on entend le moins comme pendant les boss, au château, ou à Marse, la ville portuaire. Il n'y a pas plus d'effets d'animation de la Super Nintendo qu'il n'y a de cinématiques avec du graphisme créé spécialement pour l'occasion. L'animation est d'ailleurs très sage, c'est moins de l'animation que de l'immobilité par moments, les monstres étant représentés par des images fixes qui se trémoussent. Le nombre de ces monstres est toutefois si vaste, s'élargissant, s'améliorant au fur et à mesure que la quête progresse, qu'ils figurent assurément parmi les atouts du jeu. Ce premier Lufia a toujours été moins favorisé que sa suite, Rise of the Sinistrals, qui raconte elle pourtant l'aventure de Maxim et de ses compagnons. On remarquera d'ailleurs qu'en Europe le premier jeu n'est jamais sorti, mais que sa suite a eu droit à une localisation dans quelques pays du continent (mais pas en France !) accompagnée d'un guide stratégique comme Secret of Evermore, Super Metroid et quelques autres, et qu'elle porte tout simplement le nom de Lufia. Autant qu'on puisse en juger, le premier épisode a été excommunié. A cause de défauts précis dont l'impact est décuplé par la longueur du jeu, les qualités de Lufia finissent par s'évaporer dans notre inconscient. Si les beaux monstres compensent la simplicité du graphisme et qu'un argument comme: "après tout, les premiers Final Fantasy de la console étaient encore plus moches", peut toujours faire taire les plus récalcitrants, rien ne peut justifier la fréquence des combats, ni effacer l'écoeurement qu'ils provoquent. On voudrait vomir tous les cadavres de monstres décimés jusqu'ici qu'on en étoufferait. Toutes les bonnes petites idées de Lufia, l'île de recyclage d'items, la ville des cuisiniers, les laboratoires futuristes de Shaia, et bien d'autres, ne sont plus alors que des entractes entre les combats. Ils nous aident tout de même à continuer, car on souhaite en voir le bout de cette aventure qui n'en finit plus. On s'accroche, on massacre des monstres à bras raccourcis, on se perd avec fatalisme, tout en songeant que trop de candeur et de violence n'est bon ni pour une jeune fille, ni pour un RPG. le 20 juin 2008 par sanjuro Jeu testé en version américaine
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