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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM (8-bit)


Silence dans la rue principale de NES City, les cow-boys caressent des doigts la crosse de leur Zapper.

Wild Gunman

Wild Gunman

ワイルドガンマン
Suppléments:

La Galerie du Gunman

 NES

 NES

Développeur:
Nintendo

Editeur:
Nintendo
Genre:
Tir

Joueurs:
1P

Dates de sortie
18.02.1984 Japon
10.1985 USA
198? Europe
15.02.1988 Suède
dur Difficulté:

55%Graphismes
70%Animation
60%Son
87%Jouabilité
30%Durée de vie

42%42%

Comme nos amis d'Hollywood disent: "pour faire un bon western, il faut déjà planter le décor". Même argument pour faire un bon test, il nous faut un décor. Ce sera la lande désertique de la Monument Valley. Entre les mesas et les cactus, un soleil couchant projette ses derniers rayons sur la silhouette d'un modeste cavalier. L'homme, mal rasé et crasseux, enfoui dans son poncho, descend de sa mule boiteuse. Un feu crépitant, sa selle pour oreiller et le voici installé pour la nuit. Il nous aperçoit et nous invite à partager son maigre repas, quelques haricots à la sauce pimentée. Pendant que la mule broute les rares brins d'herbe sèche qu'elle trouve ici et là, l'homme s'adresse à vous: "Eh, amigo, tou voudrais entendre oune histoire ? Tou as déjà entendou parler d'El Gran Nintendo y d'El Wild Gunman ?" Un coyote hurle au loin, un oiseau semble lui répondre quelque part dans l'obscurité. Allongés autour du feu dans la poussière du désert, le Mexicain commence à nous raconter son histoire.

En jeux vidéo, même au far-west, tout commence à l'est. Lorsque Nintendo sort son pistolet optique au Japon en 1984, un jeu sort en même temps, c'est Wild Gunman. Et pour cause, le Zapper japonais s'appelle juste "Gun" et ressemble à un colt de cow-boy, comme ces jouets pour les enfants qu'on charge avec des pétards. Mais cela est seulement la suite logique de la longue histoire de Wild Gunman, une histoire qui remonte aussi loin qu'en 1973, lorsque Nintendo introduit dans les salles d'arcade — les vraies, celles avec des jeux mais pas des jeux vidéo — un jeu de tir équipé d'un projecteur où de courtes scènes filmées en 16mm montrent des cow-boys à battre au duel de pistolet. Si vous dégainez et tirez avant votre adversaire, une scène pré-enregistrée où il s'écroule vous est montrée, tandis que si vous perdez, c'est la scène de sa victoire qui est jouée (vous pouvez voir des images de cette borne dans le supplément). Ce n'est que dix ans plus tard que le jeu arrive sur console, avec une présentation radicalement différente. Dans Retour vers le Futur II, on peut le voir sous forme de borne d'arcade (il s'agit en fait d'une borne américaine PlayChoice-10 customisée pour le film). Marty (Michael J. Fox) montre aux gamins du futur comment on joue à Wild Gunman, mais eux trouvent le jeu naze. Quand le futur du cinéma devient vraiment notre présent...

Chez nous, Duck Hunt est plus souvent associé au Zapper que Wild Gunman, évidemment parce qu'il était livré avec la console dans son fameux pack pistolet et double cartouche Super Mario Bros/Duck Hunt, le NES Action Set. Mais Wild Gunman a bien existé, et il fait partie des seuls six jeux en France qui nécessitent le Zapper. Il a d'ailleurs beaucoup de choses en commun avec Duck Hunt, c'est un peu son frère. L'un est au western ce que l'autre est à la chasse. Les similitudes entre les deux jeux commencent à l'écran titre et se poursuivent avec les modes, au nombre de trois. Dans le premier, vous affrontez un cow-boy, dans le second, deux cow-boys, dans le troisième mode heureusement l'addition s'arrête, et l'on vous offre une variante un peu plus élaborée, où vous devez descendre les bandits qui apparaissent aux fenêtres et à la porte du saloon, comme dans un western pur jus. Duck Hunt fera une copie carbone de ces modes (un canard, deux canards, et pigeons d'argile).

Le ton est aussi nettement parodique chez les deux, et après tout, il faut bien ça: un revolver n'a d'autre but que de donner la mort et ce n'est certainement pas l'impression que Nintendo souhaite voir se dégager du jeu. Il n'y a que cinq cow-boys mais tous sont bien différents et représentent divers archétypes du méchant de western: le barbu, à l'air mauvais et sournois, dents blanches toutes dehors; le grand dégingandé manquant d'assurance qui perd son pantalon quand vous tirez; l'homme en noir, moustachu, qui ressemble autant à un marshall qu'à un de ces tricheurs de poker; le Mexicain, au sombrero et poncho blanc, un fusil bien caché dedans, qui tire une gueule faite pour le cinéma; le chasseur dans son épais manteau ourlé de blanc, la gibecière à l'épaule et le visage à demi-caché par un chapeau. Bref, Terence Hill mange des spaghettis chez Sergio Leone.

Là où les deux jeux diffèrent sensiblement, c'est dans leur mode principal. Dans Duck Hunt, vous avez un nombre précis de canards à abattre avec trois balles de fusil par cible. Dans Wild Gunman, tout ce qui compte, c'est qui tire le premier, comme dans le jeu d'arcade original dont nous vous parlions en début de test. Il s'agit vraiment d'un face à face, et en tant que tel, il n'y a pas d'action avant le point culminant du duel où l'on appuie sur la gachette. Tout le reste, avant et après, est utilisé pour souligner cet instant et bâtir la tension, ou la relâcher une fois les tirs échangés. D'abord une mélodie d'atmosphère; le cow-boy adverse arrive par la droite ou la gauche de l'écran et va se placer lentement au milieu. Immédiatement après vient le moment de se regarder droit dans les yeux, jusqu'à ce que la voix digitalisée nous invite à faire feu d'un éclatant "Fire !".

Une brève animation humoristique montre votre adversaire vaincu, tandis que votre temps de réaction clignote sous le son d'une petite musique victorieuse. Le décompte des points s'ensuit et l'on passe au gunman suivant. En cas de défaite, l'écran vire simplement au rouge accompagné de quelques notes de marche funèbre. Alors oui, d'un côté Wild Gunman établit une atmosphère de circonstance, mais il le fait un peu au détriment du rythme de l'action, lente, et aussi tendue, puisqu'ici vous n'avez pas vraiment le droit à l'erreur: vous perdez une vie si vous ne tirez pas le premier. A l'inverse, dans Duck Hunt, l'action est non seulement plus frénétique, plus constante, mais aussi moins stressante au début vu que vous bénéficiez d'une marge d'échec. Ces différences furent sans doute les raisons qui poussèrent Nintendo à attacher Duck Hunt à Super Mario plutôt que Wild Gunman.

Bien évidemment, la difficulté s'en ressent également. Là où Duck Hunt se veut très progressif (quota de canards et vitesse qui augmentent), Wild Gunman préfère jouer avec les nerfs du joueur en se montrant impitoyable dès le début, sans guère évoluer par la suite. Le temps des gunmen ne descend jamais sous les quarante dixièmes de secondes, qui est la meilleure performance du chasseur. Après, Nintendo compte sur le joueur pour commettre des erreurs et manquer de régularité, ce qui ne rate pas. Le plus important en réalité est l'instant juste avant de dégainer puisque celui-ci varie aléatoirement; certaines fois le cow-boy attaque aussitôt, parfois une ou deux secondes s'écoulent, et c'est lorsque son animation change — et non lorsque "Fire !" retentit — qu'il faut faire feu pour pouvoir gagner.

C'est dans cette seconde d'intervalle que tout se joue, et durant cette seconde uniquement que vous jouez au jeu ! Si vous tirez avant, vous commettez une faute, si vous tirez après, vous êtes mort, dans les deux cas, une vie de perdue. Nintendo ne fait pas de cadeau. Est-ce que cela en vaut la chandelle, est-ce que votre habileté, au final, est récompensée ? Non, puisque, similairement à Duck Hunt, le jeu est infini. Au-delà du 99ème round, le compteur revient à zéro, tout comme le score, passé les 999999 points. Les concepteurs ne comptent pas que vous alliez si loin et, comme beaucoup de jeux vidéo des premières années, la seule voie de sortie est celle de la défaite. Dans le duel à deux, contrairement à ce que l'on pourrait penser, il suffit parfois d'abattre un seul adversaire pour l'emporter; à part ça, les règles et mécanismes ne changent pas. A vrai dire, le troisième mode n'est pas si différent non plus.

Le décor du désert a été troqué pour celui du saloon, mais les enjeux restent les mêmes: descendre tous les bandits avant qu'ils ne vous descendent. Cependant, vous êtes désormais libre de tirer plusieurs fois de suite, à n'importe quel moment; vous n'avez plus à craindre de sanction, seulement que les balles vous fassent défaut. En face, les tireurs apparaissent seuls ou par paire et font feu sans semonce. Une fois le gang abattu, vous passez à la vague suivante, de nouveau dix cow-boys. Vu qu'ils réagissent aussi vite que dans les autres modes, cela rend cette partie de "shooting gallery" encore plus difficile que les duels, quand bien même les cow-boys se montrent aux fenêtres dans un ordre précis.

Il y a un détail bon à connaître au sujet du fonctionnement du Zapper dans ce jeu, utile pour progresser même s'il gâche un peu le plaisir. Contrairement aux titres suivants, dans Wild Gunman, la partie réactive de l'image est en fait très large. Dans un jeu comme Duck Hunt ou Hogan's Alley, vous tirez sur des cibles mouvantes; ici, les cibles sont toujours statiques, en sorte que Nintendo, plutôt que de définir le sprite des personnages comme zone réactive, a divisé l'écran en portions ! Concrètement, cela veut dire que dans le mode A vous pouvez tirer n'importe où sur l'écran et vous toucherez votre adversaire, dans le mode B, il faut viser les moitiés de l'image, alors que dans le mode gang, il y a cinq parties et seule l'une d'elles est donc sensible. Si tout cela vous paraît bien incompréhensible, ne vous en faites pas, nous vous l'expliquerons un jour en détail dans un dossier spécial Zapper.

Le 18 février 1984, sortait au Japon le douzième jeu de la Famicom, Wild Gunman et son "Gun". Deux mois plus tard, il était suivi de Duck Hunt, puis, encore deux mois après, de Hogan's Alley. Western, chasse et gangsters vus par Nintendo. Wild Gunman, le patriarche de ce trio de jeux de tir arcade, est un vénérable ancêtre qui vaut désormais plus pour des raisons historiques que pour le plaisir de jeu, érodé par la lenteur de l'action. Tout dépendait, et dépend encore, de l'imagination dont on est capable de faire preuve pour pouvoir "entrer dans le jeu et se prendre au jeu", et ainsi faire des nombreux temps morts et du peu d'action présent une part intégrante de l'expérience. D'un point de vue technique, Wild Gunman a mal vieilli. Il intime le respect à ses contemporains rabougris, tels que Mario Bros et Donkey Kong (et non Super Mario et Zelda, qui apparurent bien après), mais, comme la plupart des jeux du Zapper, déçoit par son manque de profondeur.

"Et voilà comment cé termine l'histoire, gringo. Mainténant, sors doucement ton revolver et pose-lé par terre." Sous le poncho du Mexicain, le canon d'un colt pointe résolument vers votre estomac. Les dents serrées, les yeux imperturbablement fixés sur ceux du bandito, vous avancez lentement la main vers votre ceinturon. Son visage est ruisselant, le vôtre sec comme la pierre. Et puis en un instant, tout s'accélère. La main sur la crosse, le doigt sur la gâchette: double détonation, les corps roulent. L'un est en vie, l'autre est mort. Mort de peur seulement, un trou perce le sombrero: le trajet de la balle, qui brûle encore le crâne du Mexicain. Il a lâché son arme. Pas vous. Cette fois, c'est bien son front que vous visez. Vous vous relevez, puis repoussez le devant de votre pardessus pour dévoiler votre insigne. "Belle histoire, compañero, mais c'est une histoire que je connais bien. Car, vois-tu, le wild gunman, c'est moi."

le 15 juillet 2005
par sanjuro



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