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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM (8-bit)


Dis, pourquoi Tetriste ? — Parce que j'suis tout PAL.

Tetris

Tetris

 

 NES

Développeur:
Nintendo

Editeur:
Nintendo
Genre:
Réflexes / Réflexion

Joueurs:
1P

Dates de sortie
11.1989 USA
23.02.1990 Suède
05.1990 Europe
10.1990 France
trop dur Difficulté:

73%Graphismes
65%Animation
85%Son
93%Jouabilité
95%Durée de vie

87%87%
Trucs et astuces

Niveaux 10 et plus:

Ce n'est pas une astuce car elle est donnée dans la notice, mais au cas où vous ne le sauriez pas : pour commencer dix niveaux plus haut, choisissez celui de départ, tenez enfoncé A et appuyez sur Start.

Bug B-type:

A l'écran titre, attendez un moment et une démo débu­tera. Au moment où l'ordi­nateur réalise un tetris et l'écran clignote, appuyez sur Start. Démarrez ensuite une partie en mode B. Au départ, le tetris de la démo vous sera crédité, en lignes et en points !

Victoire immédiate:

Une astuce qui ressemble assez à un bug elle aussi. Dans le mode B, avant que le premier bloc ne tombe, tenez enfoncé Select et appuyez sur Bas pour le faire tomber. Vous avez gagné dès qu'il touche le sol ! Il paraît que ça ne marche que dans la version PAL.

On ne présente plus Tetris. Les blocs de l'Est ont conquis l'Ouest et le reste du monde. Personne n'y a échappé. Les barrières sont tombées et les frontières se sont ouvertes devant la suprématie russe. Tout le monde connaît Tetris, tout le monde aime Tetris.

— Ben moi j'aime pas !
— Qui a osé ?! Vous, là-bas ! Qui êtes-vous ?
— Je ne suis qu'un individu sans importance. J'ai été malade, très atteint. Mais maintenant je suis guéri et Tetris, j'aime pas du tout. C'est une longue histoire et...
— Et la vie est courte. Mais ne vous en faites pas, nous allons nous occuper de vous.
— Mais puisque je vous dis que je suis guéri.
— Maxim, Dmitri, emmenez le camarade sans importance. Vous serez soigné au Goulag, à l'air frais de la Sibérie, dans notre camp spécialement aménagé pour les joueurs récalci­trants.
— Ah mais non, lâchez-moi ! Au-secours ! Je ne suis plus malaaaade !

Bien entendu, mes amis, vous connaissez tous aussi la genèse de la création de Tetris, le plus grand jeu de l'humanité. Il a été inventé par les camarades Ivan Ivanovich et Boris Grushenko à la gloire de la mère patrie. Aucun traître passé à l'ennemi n'a été impliqué dans son développement. Et que dire de la formidable symbolique : chaque ligne effacée est un opposant du parti qui disparaît. Voilà qui encourage à faire des lignes !

Mais des éléments dissidents subsistent et essaient d'entacher la réputation de notre cher jeu et par là même l'honneur de notre pays. L'article ci-dessous voudrait vous faire croire que Tetris sur NES est moins bon qu'il ne l'est chez les yankees. Ptt ! Nous vous encourageons à ne pas le croire, mieux encore, à ne pas le lire. Evidemment vous êtes libres de faire ce que vous voulez. Mais rappelez-vous : le KGB veille.

Gloire à nos chefs Lénine et Staline ! Vive Tetris ! Vive l'URSS !

вся власть тетрисам !

Pour un jeu sans histoire, celle de Tetris est bien embrouillée. Il existe un nombre invraisemblable de versions, autorisées, non-autorisées, supervisées par l'une des compagnies qui ont détenu les droits (Elorg, BPS, Tetris Company), réalisées par des tiers, dérivées mais sans grand rapport (Well-, Word-, Hat-, tous -tris) ou même sans aucun rapport (Tetris 2 et Tetris Attack). On finit par s'y perdre. Même quand cela paraît simple, comme avec le Tetris de la NES, ça ne l'est pas.

Il sort d'abord aux Etats-Unis en 1989, puis en Europe en 1990, mais pas partout à la même date. En France, les deux versions NES et Game Boy arrivent en même temps, fin septembre, début octobre. Ailleurs, ce n'est pas le cas, l'une des deux précède l'autre. Au Japon, cette version NES n'a jamais existé. Voici un point important. Il y a bien un Tetris sur Famicom datant de 1988, mais il est tout autre, abominable, et réalisé par Bullet-Proof Software (BPS). Nintendo et eux se partagent la licence d'exploitation sur leurs consoles depuis le début.

Comme sur Game Boy, Tetris NES est entièrement réalisé par Nintendo. On lit souvent que BPS est derrière la version portable, mais c'est faux. La confusion est due à l'écran de copyrights. Il s'agit d'un portage, c'est vrai, mais c'est tout. Il suffit de jouer à ces deux Tetris si similaires ou aux jeux BPS, toujours médiocres, pour s'en rendre compte. C'est du Nintendo, cela saute aux yeux.

Un écran muet nous accueille. On est un peu troublé par ce silence, mais cela permet, une fois qu'on a appuyé sur Start, de lancer progressivement la machine, comme une locomotive se mettant en marche. C'est presque un effet de mise en scène. Les deux modes de jeu A et B sont présents. Le but, bien sûr, est d'utiliser les 7 variantes de blocs qui tombent du sommet de l'écran pour former des lignes qui disparaissent et éviter ainsi toujours que l'urne ne se remplisse. Le plus valorisant étant d'en éliminer quatre d'un coup, le fameux tetris.

Dans le premier mode, on gagne un niveau toutes les 10 lignes. A chaque niveau, la vitesse s'accroît et la valeur en points des lignes aussi. On finit forcément submergé, il n'y a pas d'autre issue. Mais si notre score est suffisamment élevé, on est récompensé par des petites fins inspirées par Baïkonour, la base d'où l'URSS lançait ses fusées dans l'espace.

Le second mode en revanche se joue dans un but précis : supprimer 25 lignes, à des degrés de vitesse et des hauteurs variés. Cela le rend plus reposant. A chaque fois, des fins différentes nous attendent. Avec 10 niveaux, 6 hauteurs, a-t-on droit à 60 fins différentes ? Dans une certaine mesure, oui. Les différences sont plus importantes entre les niveaux qu'entre les hauteurs, sauf pour le dernier, dont toutes les fins sont gentilles (à condition de les voir par ordre croissant) !

La vedette de Tetris, qui apparaît à l'écran titre et dans chacune des fins, est la magnifique Cathédrale St Vasily avec ses domes bigarrés. Матушка Россия ! Dans le registre patriotique, on se rince les oreilles avec du Tchaikovsky, un air bien connu de Casse-Noisette, qui remplace le thème ultra-célèbre du Game Boy, lui-même inspiré d'une chanson russe. Dans les deux cas, la musique est arrangée par Hip Tanaka, habile vétéran de Nintendo.

La seconde musique est la même que sur portable, un galop slave, création originale de Tanaka. La troisième aussi, mais on ne s'en réjouit pas. Un joli menuet sur Game Boy, il est remplacé par un morceau aérien sans saveur qui ne semble pas à sa place. Rajoutez encore un peu de Carmen* et vous avez la bande son. Ce qui est curieux est que malgré tous les talents musicaux de la NES, que l'on a loués en de nombreuses occasions, elle ne parvient pas à égaler l'excellence des compositions de sa petite soeur. Mais le reste alors ?

* Il s'agit de La Quadrille des toréros (acte IV) et non de La Chanson du toréador (acte II), comme le rapportent certains sites.

Le graphisme est fort simple, vert-de-gris, ou grisaillant, mais pas désagréable. Il y a deux idées intéressantes dans la présentation. D'abord d'afficher les statistiques de distribution des pièces, ce qui permet de relever les inégalités et de s'exclamer sans mauvaise foi que décidément on ne nous envoie jamais les bonnes ! Plus sympa encore, les blocs changent de couleurs à chaque niveau. Alors certes, toutes les teintes ne sont pas belles, mais c'est tout de même rafraîchissant.

La maniabilité semble identique au Game Boy... J'ai quand même le sentiment qu'elle est plus souple mais moins précise. Mais ce sont peut-être mes mains qui étaient plus petites à l'époque ! Autrement on retrouve les mêmes sensations de plaisir obsessionnel, de tension délicieuse, de jenepeplu­marété, de parties qui s'enchaînent et de mains qui nous secouent l'épaule pour nous interrompre, jusqu'à ce qu'elles finissent par s'emparer de la manette et ne parviennent plus à décrocher non plus.

Mais il y a tout de même une ombre au tableau, celle dont les bolchéviques nient l'existence. Pourtant elle est aussi réelle que la tache sur le front de Gorbatchev et aussi effroyable qu'Ivan le Terrible. Lorsqu'on arrive aux alentours du niveau 7, on ressent une poussée de vitesse, qui, au niveau 9, devient furieuse, incontrôlable et souvent mortelle. Réaliser le tetris est hors de question et le seul fait de s'élever devient périlleux. Elle se poursuit dans les niveaux suivants mais pas très longtemps, car, à moins d'être un expert, on périt rapidement.

Le jeu en devient moins accueillant, se transforme tout d'un coup en lapidation. C'est bien cela, on nous exécute. Pour cette raison et d'autres, je dois avouer que j'aime moins Tetris sur NES que sur Game Boy. La progression de la vitesse n'y est plus naturelle. Mais j'ai récemment appris une chose : notre version PAL est plus rapide que l'américaine ! Voilà qui a de quoi surprendre, car logiquement cela devrait être l'inverse, les jeux en 50 Hz sont plus lents que le 60 Hz étranger.

Pour éviter ce désagrément, le programme est parfois corrigé pour fonctionner à peu près à la même vitesse. Dans le cas présent, Nintendo a voulu faire du zèle et l'a rendu plus rapide que l'original. La différence cependant ne se voit que tardivement. Marginale au niveau 10, elle devient manifeste au 16 et s'emballe au 19, qui est presque aussi rapide que le 29 américain ! Nintendo a peut-être voulu redéfinir la version PAL d'après le Game Boy, où l'on ne peut pas dépasser le niveau 20.

Au bout du compte, le joueur moyen, pour qui ces niveaux brutaux semblent de toute façon bien éloignés, est moins affecté par la différence avec la NES américaine qu'avec le Game Boy. Les deux versions se ressemblent et chacune est bien adaptée à son support, pourtant la portable est clairement la meilleure. Au problème de la vitesse, s'ajoute l'accélération énervante de la musique et une distribution moins avantageuse des pièces, ainsi que d'autres facteurs pas aussi déterminants comme le mode 2 joueurs, absent sur NES, et des lacunes esthétiques.

Ce qui ressort est que, aussi simple soit Tetris sur Game Boy, c'est une production très soignée et bien calibrée. Ca se comprend : c'était l'ambassadeur de la console pour son lancement ! Il fallait faire une impression irréprochable et ne pas dégoûter les débutants.

La version NES au contraire semble pressée, à tous points de vue. Pressée de prendre forme, pressée de sortir, pressée de nous faire perdre, quitte à ne pas être aussi réussie qu'elle pourrait l'être, à être inférieure à ce que l'on était en droit d'attendre d'elle. C'est un peu comme si, pour faire honneur à sa cadette, l'aînée n'avait pas voulu être remarquable et s'était volontairement effacée. Tetris existe sur NES, mais triomphe sur Game Boy.

C'est peut-être une volonté stratégique de Nintendo. Et ironie du sort pour un jeu si russe, le meilleur Tetris sur NES, le mieux équilibré, ne peut donc se jouer qu'aux Etats-Unis ! Mais qu'on se le dise : Tetris, né en Union soviétique, est devenu un succès de la Russie moderne. Le rideau de fer s'est déchiré, le bloc de l'Est s'est effondré, comme si chaque ligne que les joueurs faisaient disparaître étaient celles des murailles de l'URSS.

le 25 décembre 2019
par sanjuro



Jeu testé en version européenne
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