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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM (8-bit)


Che Guevara et Fidel Castro sur nos NES européennes. Pour de vrai !

Guerrilla War

Guerrilla War

ゲバラ (Guevara)
 

 NES

Développeur:
SNK

Editeur:
SNK
Genre:
Action

Joueurs:
1-2P

Dates de sortie
26.12.1988 Japon
06.1989 USA
1989 Europe
sans Difficulté:

86%Graphismes
78%Animation
85%Son
94%Jouabilité
65%Durée de vie

87%87%
Trucs et astuces

2-P résurrection:

Si l'un des joueurs épuise ses vies avant l'autre, il est possible de le faire revenir immédiatement en appuyant sur A et B simultanément.

Stage select, difficulté:

A l'écran de sélection du nombre de joueurs, maintenez enfoncés A et B et appuyez sur Start. Un nouveau menu apparaîtra permettant de choisir le niveau de départ (à l'exception du dernier) et 3 niveaux de difficulté. La sélection s'effectue avec B et A.

"Después supimos que era cierto, que en una revolución se triunfa o se muere (si es verdadera)."

Lettre du Che à Fidel Castro


Ah ! Voici un test qui me tient particulièrement à coeur et que je souhaitais faire depuis longtemps. Pour en comprendre la raison, il faut se rappeler les années de l'implantation de la NES en France. Ceux qui ne les ont pas vécues pourront toujours essayer de les imaginer, mais ils ne seront pas à même de saisir le bouleversement et l'excitation que cette nouveauté surgie de nulle part produisit. Rien à voir avec les gadgets et les consoles d'aujourd'hui, attendus, disséqués et démystifiés sur Internet. Le rêve n'a plus cours au XXIème siècle, il est haché menu pour la cause de l'information.

A cette époque, Nintendo avait l'habitude de distribuer dans les magasins un catalogue de jeu presque annuellement (un jour il faudra que je vous les scanne étant donné que je les ai tous conservés). Qu'est-ce qu'ils avaient pu faire rêver ces catalogues ! Il y en avait eu un en particulier, un dépliant, dont j'avais déjà parlé dans le test de Dragon Warrior parce que le jeu y était annoncé alors même qu'il ne vit jamais le jour chez nous, en Europe. Il y avait quelques autres jeux comme lui qui semblaient intéressants mais que les années emportèrent sans jamais dévoiler leur secret. La beauté du retrogaming est que l'on peut, aujourd'hui, retrouver ces titres, percer leurs mystères et ne pas laisser d'inconnus.

En une photo d'écran et un texte succinct nous était présenté, parmi d'autres, un certain Guerrilla War. En France, ce fut la première et la dernière fois qu'on vit son nom. Ce qui a de quoi surprendre en revanche, est que cela ne s'applique pas à tout le reste de l'Europe. Il existe bel et bien une version européenne de Guerrilla War sur NES, apparemment distribuée en Espagne, peut-être aussi dans d'autres pays. Le thème du jeu étant cher aux hispanistes, ce n'est pas tout à fait inattendu. Et c'est d'ailleurs là un autre point d'intérêt: Guerrilla War n'est pas qu'un clone fort réussi d'Ikari Warriors par les auteurs d'origine, c'est aussi un jeu à résonances politico-historiques. Ils ont osé !

Avant NAM-1975 sur Neo Geo et sa guerre du Viet-Nam, SNK s'intéressait déjà aux conflits mondiaux. Dans Guerrilla War, c'est la révolution cubaine de 1956-59, de l'arrivée des révolutionnaires sur l'île à la défaite du dictateur Batista, qui sert de toile de fond. Dans les versions occidentales du jeu, il n'est jamais question de Cuba et les noms ont été changés, trop peureux que nous sommes de toucher à des sujets brûlants. Mais dans la version japonaise, pas de faux-fuyants: l'île est Cuba, le boss final Batista et le jeu se nomme Guevara comme l'un de ses protagonistes. Eh oui, pas de Player 1 et Player 2, le premier joueur est désigné sous le nom de (Ernesto) Guevara et le second sous le nom de (Fidel) Castro, image à l'appui. Au moins, ça ne laisse pas de doute dans les esprits.

Bien évidemment, SNK a pris de grandes libertés avec l'histoire, tellement, qu'à part les noms, il n'y a qu'une chose que le jeu ait en commun avec les évènements réels: le trajet effectué, de l'arrivée en bateau à la pointe sud-est de l'île, puis à la lente remontée vers la Havane, en traversant la ville de Santa Clara, au cinquième niveau. Sinon, n'allez pas croire que la révolution cubaine c'est juste deux hommes affrontant des hélicoptères et des tanks, vous seriez à côté de la plaque, surtout si c'est ce que vous comptez dire en soutenant votre thèse d'histoire. Guerrilla War a encore une autre caractéristique qui le distingue du commun des jeux et est représentative de l'évolution de SNK sur consoles: il dispose de continus infinis qui vous replacent là où vous êtes mort, sans interrompre l'action.

En d'autres termes, c'est un jeu à la difficulté zéro. A moins que le joueur s'impose de nouvelles règles, comme de ne pas utiliser ces continus par exemple, il le terminera dès sa première partie. A deux, il est même possible avec un code tout simple de regénérer perpétuellement. En arrivant sur NES, SNK, éditeur venu de l'arcade, s'est troublé: ils ne savaient pas comment s'y prendre avec la difficulté sur consoles. Ils n'ont vu que deux façons d'adapter leurs machines d'arcade, ce que Guevara est aussi à la base: ne pas donner de continus au joueur, c'est le modèle Alpha Mission et Ikari Warriors, ou leur en donner indéfiniment comme ici. Leur vision était dictée par le système de paiement des jeux d'arcade, par les pièces de monnaie, réduisant la gestion de la difficulté sur cartouches à cette proposition bipartite: soit le joueur n'a qu'une pièce, soit il en a autant qu'il le souhaite.

Du point de vue du joueur, la question est de savoir si un jeu sans difficulté est sans intérêt. C'est un sujet de discussion compliqué, digne d'un cours de philo (décidément, cette semaine...), qui dépasse le cadre de cet article. En deux questions, on peut cependant faire le point sur Guerrilla War. Est-il amusant même sans vraie difficulté ? La réponse est oui. L'absence de challenge pénalise-t-elle le jeu ? La réponse est encore oui. Le plus révélateur est peut-être la comparaison avec Ikari Warriors. Même sans difficulté, Guerrilla War est bien plus amusant à jouer.

On l'a dit, c'est une resucée du titre phrase de SNK. C'est Ikari Warriors transposé sur Cuba. Cependant, outre les progrès logiques qu'apportent deux ans d'intervalle, ce qui transforme l'expérience est la disparition de ce qui rendait la version NES terrible à jouer. La maniabilité rotative a été abandonnée, tout comme les mouvements et tirs désordonnées des ennemis. Le Che et son fidèle Castro se contrôlent comme on s'y attend, obéissant tout simplement aux mouvements de la croix de direction; une bonne maniabilité doit s'établir naturellement. B sert à tirer, A à lancer des grenades, et tout deux viennent avec des fonctions automatiques. Quant aux ennemis, ils arrivent désormais par dizaine et en formation, un des meilleurs aspects d'Ikari Warriors en arcade qui avait été complètement délaissé sur NES.

Leurs tirs sont assez lents, ce qui aide grandement pour les éviter et abaisse proportionnellement la difficulté. Et c'est là une drôle de constatation, car elle démontre que même sans son système actuel d'invulnérabilité, Guerrilla War aurait été d'un niveau abordable. Des continus limités, ou illimités mais renvoyant au début du niveau, auraient suffi à en faire un défi intéressant. On a l'impression que SNK, à tellement vouloir se racheter de la difficulté monstrueuse d'Ikari Warriors, a fini par en faire un peu trop; même le code de sélection des niveaux est présenté comme une commande normale dans la notice américaine. Les tanks que l'on peut piloter sont toujours présents, mais moins souvent car ce sont désormais des armes redoutables qui ne nécessitent pas de réapprovisionnement et sont aussi maniables que nos deux révolutionnaires le sont à pied.

Le reste de l'armement est toujours dispensé sous forme de lettres mais son efficacité a été accrue. Outre le lance-roquettes [L], la mitraillette [S] et les super grenades [B], on peut acquérir un lance-flammes [F] qui produit une gerbe de feu réaliste, suite brutale d'explosions, des balles explosives qui se séparent en trois à l'impact [T] et une sorte de méga-bombe [C] qui fonctionne comme [K] mais avec un déclenchement manuel. Cet arsenal est fort utile car l'ennemi ne manque pas de ressources. C'est l'une des joies coupables de Guerrilla War que de se frotter à ces légions de soldats verts kaki (et parfois d'autres couleurs aussi). Ils se déploient selon une stratégie mûrement réfléchie dans leur cerveau binaire, s'avancent en peloton ou s'embusquent dans des tranchées, dans des trous, tentent de nous encercler, n'hésitent pas à s'allonger dans la boue ou à s'installer sur les toits pour nous pilonner.

C'est comme de se retrouver dans sa chambre vingt ans en arrière, avant que les jeux vidéo n'y débarquent, quand on jouait encore aux petits soldats. Il y a une telle inventivité dans leur tactique de combat qu'on souhaiterait presque les voir gagner la guerre (on ne dirait peut-être pas la même chose sans les continus). A l'écran, il ne faut rien perdre des yeux, autrement on risquerait de rater le soldat qui prend un otage ou celui du génie qui répare les barricades. Il y a aussi des prisonniers à libérer, attachés à des poteaux. Il faut faire attention de ne pas les tuer, les balles perdues étant plus nombreuses que celles arrivant à destination. Mais bien entendu, dans le triste monde des jeux vidéo, une vie n'est qu'une affaire de points. On en gagne encore en tuant des animaux comestibles et en sauvant d'autres victimes suspectes (cet homme courant après une femme, est-ce un viol ?).

La durée de vie est la première à pâtir d'un jeu sans difficulté. Le mode 2 joueurs lui redonne un peu de tonus, parce qu'avec un associé une petite partie est toujours agréable, surtout quand les circonstances nous sont trop favorables comme l'a maintes fois prouvé Probotector avec le code des 30 vies. Pour le reste, il faut s'en remettre entièrement au level design. Guerrilla War est long de 10 niveaux. Un bon chiffre ! Ils sont verticaux, avec occasionnellement des coudes horizontaux, une nouveauté par rapport à la formule d'Ikari Warriors. Les premiers sont assez variés, les décors changent plusieurs fois et on a quelques occasions de patauger. De la jungle on passe à un village puis à une rivière qui se conclut par une mémorable bataille sur le dos d'un sous-marin. Après ça on arrive à la mine, et on commence à trouver la couleur rousse un tantinet agaçante malgré les enchevêtrements de rail et les ponts de fortune.

A mi-parcours, au cinquième niveau à l'intérieur de la mine, on a droit à un niveau bonus. A bord d'un chariot, on collecte des prisonniers au lasso. Manifestement inspiré d'évènements réels. La dernière partie se déroule dans la ville qui est beaucoup moins variée que les niveaux précédents. C'est d'autant plus vrai qu'on y revient au niveau 8, après une traversée remuante des égoûts. La ville, c'est le creux de la vague, là où même les continus infinis n'empêchent pas de ressentir de la lassitude; la formule de Guerrilla War étant pour le meilleur et pour le pire scellée dans la pierre. Heureusement, la base militaire de l'avant-dernier niveau est un bon morceau, un baroud d'honneur où les forces ennemies ont recours à leurs dernières ruses. Le reste des troupes s'est amassé lui sur la route qui mène au palais de Batista.

Certains se demandent peut-être pourquoi il n'y a pas eu de Super Ikari Warriors sur Super Nintendo. On leur répondra que c'est parce que SNK alors était trop occupé à travailler sur sa propre console, la Neo Geo. Mais c'est faux ! S'il n'y a pas eu de Super Ikari Warriors, c'est parce qu'il existait déjà sur NES, ici même, sous le nom de Guerrilla War. C'est un jeu bien fait, tout ce que Ikari Warriors aurait pu être, la facilité en plus, peut-être en trop. Il est agréable graphiquement, fouillé sans être impressionnant, clignote encore beaucoup trop mais surtout à cause des tanks et des hélicos. Il se permet même, chose assez rare de la part de SNK, de bonnes mélodies (mention spéciale au premier niveau), de celles qui semblent pousser toutes seules sur NES. Il a de la personnalité, des bizarreries qui font des scènes cultes, comme ces deux zigotos, ces boss jumelés qui une fois leur machine détruite vous attrapent par la jambe et vous font tournoyer avant de vous jeter au loin. Un futur classique du retrogaming, ce Guerrilla War ! Si on veut bien lui faire cet honneur.

Une question continue tout de même de me travailler... est-ce que Fidel Castro est au courant qu'il a été la vedette d'un jeu vidéo ? Et qu'en pensent les Etats-unis ?

le 16 octobre 2009
par sanjuro



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